Une véritable réconciliation ne peut pas se construire sur l’oubli ou sur l’amnésie

Pour la dix-septième année consécutive, le Rwanda et de nombreux citoyens du monde entier vont commémorer le génocide des Tutsi perpétré en 1994 par un gouvernement extrémiste soutenu, jusqu’à sa disparition, par un certain nombre d’États. C’est l’occasion de rappeler, en ce qui concerne la France, pays d’accueil par excellence, qu’aucun présumé génocidaire n’a été jugé. Seuls quelques-uns ont été mis en examen, mais la plupart continuent de vivre en toute impunité, dans l’indifférence générale.

Un présumé génocidaire, visé par une « fiche rouge » d’Interpol a été récemment arrêté à Toulouse. Sans l’action et la détermination du CPCR qui venait de déposer plainte contre monsieur Tite Barahira, cette arrestation n’aurait fait l’objet d’aucune médiatisation. Une autre plainte déposée en juin 2010, toujours à Toulouse, n’a toujours pas eu de suite à ce jour…

Il semblerait bien que les autorités de tout bord, en faisant traîner les procédures, misent sur le découragement des rescapés et de leurs familles. Il serait parfois tentant, en effet, de jeter l’éponge, de stopper net tout nouveau dépôt de plainte. Il serait facile, parfois, de se laisser gagner par le découragement devant l’inertie d’une justice qui semble privilégier le bourreau au détriment des victimes. Le renoncement aux poursuites donnerait satisfaction à beaucoup d’institutions ou d’individus de notre pays. La tentation existe, le risque d’y succomber, non. Le 14 avril, le Sénat français devrait adopter le texte instituant le « pôle spécialisé » pour crime de génocide et crimes contre l’humanité. Présenté en procédure accélérée, ce projet de loi sera ensuite soumis à la Chambre des députés et d’ici la fin de l’année, la France devrait s’être dotée de nouveaux moyens pour poursuivre en justice les présumés génocidaires rwandais présents sur le sol français. Reste à savoir quels moyens seront mis à la disposition de ce pôle !

Si aujourd’hui l’heure est au recueillement et à la mémoire, la justice doit rester un objectif prioritaire. Nous n’aurons de cesse de demander à notre pays de respecter ses engagements. La France doit juger les personnes soupçonnées d’avoir participé au génocide au Rwanda et présentes sur le territoire français. La France doit cesser d’accueillir de nouveaux bourreaux. Une véritable réconciliation ne peut pas se construire sur l’oubli ou sur l’amnésie : nous restons convaincus que seule la justice reste le chemin qui mène à la paix.

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