TPIR: deux anciens ministres du gouvernement génocidaire acquittés en appel.

Avec le TPIR, il faut désormais s’attendre à tout, surtout au pire. La Chambre d’appel vient en effet d’acquitter Justin Mugenzi et Prosper Mugiraneza, deux anciens ministres du gouvernement génocidaire au Rwanda en 1994, alors qu’ils avaient été condamnés en première instance à 30 ans de réclusion pour leur participation au génocide des Tutsi.

Ces deux ministres avaient été condamnés pour avoir participé au Conseil des ministres du 17 avril avril 1994 qui avait pris la décision de révoquer le préfet Jean-Baptiste Habyarimana. Cette destitution puis son élimination avaient été le signal donné aux tueurs pour passer à la vitesse supérieure, le préfet ayant jusque- là réussi à tenir Butare à l’écart des massacres de masse. La Chambre d’appel a estimé, et on pourrait en rire s’il ne s’agissait pas de génocide, que le limogeage du préfet pouvait avoir été motivé « pour des raisons politiques et administratives ». Tous les observateurs honnêtes savent bien que le préfet Habyarimana était le dernier rempart à la barbarie et le dernier obstacle à la mise en oeuvre du génocide dans la préfecture de Butare.

Les deux ministres avaient aussi été condamnés pour avoir participé à une réunion publique au cours de laquelle le président par intérim,  Théodore Sindikubwabo, lui-même originaire de Butare, avait tenu des propos qui appelaient à éliminer les Tutsi de la région. La Chambre d’appel a estimé que les accusés, ne connaissant pas à l’avance les propos du président, ne pouvaient être condamnés. Mais les a-t-on entendus se désolidariser de ce discours incendiaire ? Ont-ils, à un moment ou à un autre, manifesté leur désaccord ?

En prononçant un tel acquittement, le TPIR s’est une nouvelle fois décrédibilisé. Il est temps que cette instance internationale ferme ses portes: les victimes n’ont que trop souffert de telles décisions incompréhensibles pour beaucoup des observateurs.

Maître Eric Gillet, avocat des parties civiles dans plusieurs procès en Belgique, s’est dit « atterré » par cette annonce. Et atterrés, nous le sommes tous. Quelle confiance peut-on faire à la justice ? L’acquittement des deux ministres est révoltant, d’autant qu’il vient après plusieurs autres, tout aussi incompréhensibles. C’est en tout cas un appel à la vigilance pour le jour où des présumés génocidaires vivant en France seront enfin déférés devant une Cour d’assise. Un procès n’est jamais gagné d’avance. Nous aurons besoin de toute la compétence et de toute l’énergie de nos avocats pour que nous n’assistions pas à de telles errances.

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