Refus du Conseil d’Etat d’accorder l’asile politique à Agathe Kanziga Habyarimana

Alors que le Conseil d’Etat vient de confirmer le refus d’accorder l’asile politique à Agathe Kanziga Habyarimana, ce qui fait d’elle une personne expulsable, nos associations demandent que celle-ci ne soit pas expulsée et soit jugée par la justice française pour son implication dans le génocide des Tutsi du Rwanda qui a fait près d’1 million de morts en 1994.

Comme on pouvait s’y attendre, après avoir mis sa décision en délibéré, le Conseil d’Etat vient, ce 16 octobre, de se ranger à l’avis du rapporteur public, qui recommandait de ne pas accorder l’asile politique à madame Agathe Kanziga, veuve du président extrémiste hutu Juvénal Habyarimana. Cette décision semblait s’imposer au vu du réquisitoire de la Commission de Recours des Réfugiés qui justifiait son refus (en février dernier) en affirmant que madame Habyarimana aurait participé « en tant qu’instigatrice ou complice » au « crime de génocide » commis au Rwanda en 1994.

Cette même Commission des recours avait été saisie par l’ancienne première dame suite au refus, le 4 janvier 2007, par l’OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides) d’accorder l’asile politique à celle qui joua, selon de nombreux observateurs, un rôle central dans la mise en place de la machine génocidaire au Rwanda. L’OFPRA estimait ainsi « qu’elle [Agathe Kanziga Habyarimana] s’est trouvée au cœur du régime génocidaire » et « qu’elle ne peut valablement nier son adhésion aux thèses hutues les plus extrémistes, ses liens directs avec les responsables du génocide et son emprise réelle sur la vie politique du Rwanda ».

Une telle décision du Conseil d’Etat devrait normalement s’accompagner d’une expulsion du territoire français, mesure qui devrait dépendre du ministère de l’Intérieur. Extrader madame Kanziga vers le Rwanda ne semble toutefois pas possible dans la mesure où jusqu’à présent la justice française, à la suite du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR, chargé de juger les hauts responsables du génocide), a toujours refusé cette solution.

Selon nos associations, l’expulsion de madame Kanziga vers un pays d’accueil pourrait être envisagée, mais cette solution ne peut nous satisfaire car il est fort probable qu’une telle décision lui permettrait d’échapper à la justice, ce qui n’est pas concevable.

Reste une dernière solution : tolérer madame Kanziga sur le territoire français tout en exigeant qu’elle rende des comptes à la justice de notre pays : une information judiciaire a en effet été ouverte contre elle suite à la plainte déposée le 13 février 2007 par le Collectif de parties civiles pour le Rwanda (CPCR) pour « complicité de génocide » et « complicité de crime contre l’humanité ». C’est la solution que nous préconisons et nous demandons instamment aux autorités judicaires françaises de ne plus tarder à juger madame Kanziga, ainsi que tous les Rwandais qui sont soupçonnés d’avoir participé au génocide des Tutsi et qui vivent en toute impunité sur le territoire français.

Tous ceux qui attendent que justice soit rendue ne comprendraient pas que la justice française, par son inertie, protège des présumés génocidaires, fasse de la France un refuge pour ces derniers et se rende ainsi complice des génocidaires. Le président du TPIR, le juge Dennis Byron, a lui-même exhorté le 8 octobre dernier les juridictions nationales à jouer pleinement leur rôle afin d’éviter l’impunité des « génocidaires » après la fermeture de la juridiction.

Un préalable cependant s’impose pour une réelle efficacité de la justice : que les juges d’instruction chargés de ces dossiers soient dessaisis dans les plus brefs délais de toutes les autres affaires qui leur ont été confiées et qui les surchargent. Cette exigence est aussi celle des juges eux-mêmes.

Communiqué du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR) et de Survie

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