Procès Simbikangwa: 13 février 2014

Audience de Filip Reyntjens, professeur en droit constitutionnel et droits de l’homme à Anvers.

« Je n’ai rien à dire. J’attends vos questions ». C’est la première fois qu’un témoin ne souhaite pas faire de déclaration préliminaire. Ce sera donc une suite de questions réponses.

Concernant ce qui s’est passé au Rwanda en 1994? Combinaison de trois éléments:

     – transition politique et démocratisation très déstabilisatrices

     – la guerre civile déclarée le 1 octobre 1990: les dirigeants ont peur de perdre le pouvoir et leurs privilèges.

     – la bipolarité Hutu/Tutsi difficile à gérer (voir Wallons/Flamands en Belgique, catholiques/protestants en Irlande du Nord), alors que s’était installée une tripolarité (MRND/opposants/FPR.

L’attaque du FPR de mars 1993 est interprétée comme une trahison. Scission des partis politiques en deux: fidèles à la ligne du parti/Pawa extrémistes. Le MRND a contribué à cette scission des partis d’opposition. Le FPR s’était rendu compte qu’il ne pouvait pas gagner les élections car il n’avait pas d’appui populaire au Rwanda. Des Tutsi se sont dit malheureux de cette attaque car il y avait un processus de démocratisation en cours.

« Je ne connaissais pas bien Habyarimana (?) mais pour les privilégiés de l’ancien système, il y avait une menace pour les élites hutu: perte de leurs privilèges, du pouvoir économique, fin de l’impunité.

L’Akazu? Oui, je pense qu’il y avait une « akazu », une nébuleuse dont les membres étaient changeants, constituée essentiellement des gens du Nord (Gisenyi/Ruhengeri). L’akazu, ce sont les Hutu purs et durs. Simbikangwa est cité dans un document de Filip Reyntjens d’octobre 1992 comme faisant partie des « escadrons de la mort ». Le Rwanda se caractérise par une situation de violence: violation des droits humains, massacres de Tutsi, beaucoup de violence malgré plus de liberté dans la presse. D’où violence dans des journaux: Kangura, Umurava, Ikinani. (autant de journaux avec lesquels Simbikangwa a collaboré).

Filip Reyntjens souligne la responsabilité écrasante de la communauté internationale en décidant la diminution drastique des forces de la MINUAR le 21 avril 1994, responsabilité aussi de la Belgique et de la France.

A la question de savoir pourquoi Filip Reyntjens est cité comme témoin de la défense: » J’ai rencontré les témoins de la défense, je ne voulais pas témoigner. Le débat est dévoyé en France dès qu’on parle du Rwanda ».

Le témoin termine en disant que l’impunité qui régnait au Rwanda pouvait laisser entendre que tout était permis. les crimes de guerre du FPR au Congo n’ont pas été punis. Quant à Gasana Ndoba, « il a abusé des droits de l’homme pour rouler pour le FPR ».

 

 

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