Procès Laurent BUCYIBARUTA. Vendredi 20 mai 2022. J10


Audition de monsieur Vincent de Paul NSABIYERA, en visioconférence. Condamné pour génocide à 10 ans de prison entre 1996 et 2006.

Pendant toute son audition, le témoin va parler lentement, semblant peser ses mots, avec une colère rentrée. Toujours sur ses gardes.

Dans sa courte déposition spontanée, le témoin déclare qu’il a bien connu Laurent BUCYIBARUTA, préfet de Gikongoro pendant le génocide commis contre les Tutsi en 1994. Il habitait lui-même près de la préfecture.

Sur questions de monsieur le président de la cour, le témoin précise qu’il était à l’époque responsable du service de Santé dans le cadre de la vaccination des maladies endémiques. Il était directeur du PEV, Programme Élargi de Vaccinations. Son activité ne dépendait pas des services de la préfecture. Il ne rencontrait le Préfet qu’à certaines occasions, lors de l’Umuganda par exemple (travaux communautaires de développement).

Le témoin était membre du PSD, parti social démocrate mais n’a jamais participé à des entraînements. Par contre, il connaît un certains nombre de personnes dont le président égraine les noms. Il a aussi vu des Interahamwe[1] qui s’entraînaient à SOS Village Enfants, tout près de la préfecture. Ces entraînements se déroulaient sous la responsabilité d’un certain Cassien BARUGIRA. Le témoin n’a pas participé à l’auto-défense civile. Quant aux rondes, il n’y a participé qu’une fois, et encore forcé de le faire.

Les troubles à Gikongoro ont commencé après la chute de l’avion du président HABYARIMANA. La RTLM[2] désignait les Tutsi et les militaires du FPR[3] comme auteurs de l’attentat.

Monsieur NSABIYERA nie avoir été présent sur les barrières qui avaient été érigées pour « barrer la route aux Inkotanyi[4] qui infiltraient le pays« . Après l’attentat, les ennemis n’étaient plus seulement les Inkotanyi, mais les Tutsi. Il a entendu dire que des réfugiés s’étaient rendus à l’évêché et conduits ensuite à Murambi sur décision des autorités. il entendait dire aussi qu’on tuait les Tutsi aux barrières tenues par des gens armés d’armes traditionnelles.

Le témoin justifie les tueries par la colère des gens dont on avait tué le président. Il avoue que les gendarmes, sous l’autorité de SEBUHURA, qui « haïssait les Tutsi », aurait dû protéger les gens.

Lorsque monsieur le président LAVERGNE lui demande ce que la date du 21 avril 1994 évoque pour lui, il fait semblant de ne pas comprendre la question pour finir par reconnaître que « ça (lui) dit quelque chose: le massacre des Tutsi à Murambi. J’étais tout près et j’ai participé aux attaques. »

Vêtements de Murambi
Vêtements de Murambi : près de 50 000 personnes ont été massacrées dans et autour de cette école technique. Les ossements et les cadavres momifiés ont été ramassés et déterrés pour le mémorial.
Photo : © Bruce Clarke

« Vous étiez vous aussi en colère? » questionne le président.

« Pas de colère particulière, répond le témoin, je suis allé me liguer aux autres parce que c’est là que j’habitais. Les gendarmes ont attaqué à l’aube avec des armes lourdes. J’ai entendu les explosions de loin. Nous sommes allés à Murambi, avons encerclé le site pour que les Tutsi ne puissent s’échapper. Quant aux nombre de victimes, je n’ai pas compté. Les autorités doivent savoir mieux que moi. » Et de poursuivre qu’après avoir tué à Murambi, certains sont partis à Cyanika sous la supervision des gendarmes, pour tuer.

Le nom de Philippe NTETE lui dit quelque chose: « Il a fui et a survécu par chance. » Quant à Faustin TWAGIRIMANA, qui dit être son frère, le témoin dit qu’il n’a pas d’information à ce sujet!

Sur question de l’assesseure, il ne confirme pas sa participation à la barrière  de Kabeza pendant la journée. Elle était simplement sur son chemin!

Me QUINQUIS : vous avez indiqué vivre proche des bâtiments de la préfecture, est-ce qu’il y avait une bonne vue depuis ces bâtiments sur l’ETO[5] de MURAMBI ?

Vincent de Paul NSABYERA : oui très bien, on voyait bien.

Viennent ensuite les questions de maître KARONGOZI. Pourquoi a-t-on tué, dès le 7 avril, des responsables du PSD? « Ça s’est passé comme ça » rétorque le témoin. Ils étaient de connivence avec le FPR. Le MDR[6] avait peur de Frédéric NZAMURAMBAHO, le président du PSD[7]. » Il reconnaît qu’en allant à Murambi, il a été « faible« . S’il a rejoint ses semblables, c’est pour qu’ils ne viennent pas le tuer! (NDR. Une explication comme une autre.)

Maître GISAGARA demande la parole mais monsieur le président, manifestement énervé, hésite à lui la donner. Pour finir par dire: « Posez votre question. » La question portait sur la qualité des autorités dont parlait le témoin: « Les autorités préfectorales, médicales, mon supérieur » répond le témoin.

Le ministère public évoque le rôle de la RTLM dont le témoin a parlé dans son audition par les enquêteurs du TPIR[8] en 2002: « C’est le FPR et les Tutsi qui ont abattu l’avion » aurait-il répété. Pas de réelle réponse du témoin. Quant à SEMAKWAVU, il le connaît comme bourgmestre de Nyamagabe, mais il ne l’a pas vu.

La parole est enfin donnée à la défense. Maître BIJU-DUVAL rappelle au témoin qu’il a déclaré, entendu par les enquêteurs, qu’l avait plaidé coupable mais qu’il n’avait tué personne. « Vous êtes sûr que vous n’avez tué personne? »

« J’étais là pour empêcher les Tutsi de fuir » se contente de répondre le témoin.

« Vous voulez effacer votre propre responsabilité » conclut l’avocat.

 

Audition de madame Juliette MUKAKABANDA, rescapée.

« Je suis veuve à cause du génocide. J’avais un mari et trois enfants. Il me reste un enfant. J’ai suivi l’enseignement primaire de base et j’ai travaillé dans la plantation de thé de KITABI, comme responsable du groupe des filles.

C’est sur le lieu de mon travail que j’ai rencontré celui qui devait devenir mon mari. Il était orphelin des événements de 1963. (NDR. A Noël 1963 et dans les jours qui ont suivi, des massacres d’envergure ont été organisés à Gikongoro lors de ce qu’on a appelé peut-être à tord le « petit génocide de Gikongoro. On a dénombré environ 20 000 Tutsi tués).

Elle-même est Hutu et elle explique les tueries de 1994 par l’impunité dont ont bénéficié les tueurs depuis plusieurs décennies. Son mariage avec une Tutsi n’avait pas posé de problèmes et elle avait été très bien acceptée dans sa belle-famille.

« L’attentat contre le président HABYARIMANA est aussitôt attribué aux Inkotanyi[9]. Les Hutu se déplaçaient, participaient à des réunions, brûlaient les maisons des Tutsi. La radio proclamait que l’ennemi était le Tutsi. Les Hutu pillaient les maisons et les autorités leur disaient de tuer d’abord les occupants avant de prendre leurs biens.

En entendant les premiers coups de feu, nous avons décidé de fuir avec les voisins. Nos voisins hutu nous demandaient pourquoi nous fuyions. Je voulais aller rejoindre mes parents mais mon mari a refusé que j’aille à MUDASOMWA car il ne voulait pas voir ses enfants se faire tuer sous ses yeux.. Nous prenons la décision de nous réfugier à l’église ADEPR[10]. Je pars avec mon bébé au dos et mon mari me rejoint deux jours plus tard. Ils sont accueillis par le pasteur Faustin. SEMAKWAVU est alors arrivé avec des gendarmes. Il répercute l’ordre de Laurent BUCYIBARUTA: nous devons partir à MURAMBI.

L’adjoint de l’église ADEPR, Simon-Pierre NZUBAHIMANA, refuse de nous cacher, craignant que les locaux des classes ne subissent des dommages. Nous partons avec SEMAKWAVU et les gendarmes. Sur la route, les Hutu nous interpellaient et tuaient partout.

A notre arrivée à MURAMBI, l’eau avait été coupée et nous avions peur d’aller puiser en dehors du site. Deux personnes sont mortes de soif. On avait bien compris qu’on nous avait rassemblés pour nous tuer. Les Hutu réfugiés avec nous sont invités à se rassembler ailleurs. Eux bénéficiaient de la nourriture qui était  distribuée. »

En face des nombreuses attaques, les réfugiés se défendent en lançant des pierres et des briques. Un recensement auprès des réfugiés est organisé afin de prévoir la quantité de nourriture à distribuer, soi-disant. Probablement, selon les réfugiés, pour préparer les attaques.

Les militaires auraient reçu l’ordre du préfet de fouiller les Tutsi. Ils n’avaient pas de machettes, seulement des petits couteaux qu’on leur a repris. Pour pouvoir manger, les réfugiés décident de tuer une vache. Ils doivent manger la viande crue.

« Ma belle-famille m’aimait beaucoup, poursuit le témoin. Ils voulaient sauver leur belle-fille. Mon mari intervient auprès des gendarmes pour qu’ils me laissent quitter le camp. Comme ces derniers ne veulent pas que je parte avec ses enfants, je refuse de partir. »

La CARITAS fait distribuer de la nourriture et une attaque est organisée après une réunion animée par le président SINDIKUBWABO, le 19 juin, dans la salle du CEPEP. Les réfugiés sont décidés à se défendre mais son mari est blessé.. Le témoin garde sur elle sa Bible et sa carte d’identité. Les assaillants jettent des pierres que les réfugiés leur lancent à leur tour.

« Ne tuez pas ma femme, implore le mari du témoin. C’est votre sœur. »

« Si elle est Hutu, donne-nous sa carte d’identité! » répondent les tueurs. « Mais si tu veux qu’on la sauve, qu’elle laisse son enfant. » Ces derniers lui prennent sa Bible et sa carte d’identité. Ils fracassent la porte d’entrée à l’aide d’une grosse pierre. Madame MUKAKABANDA sors avec son bébé au dos. Elle va être sauvée par un jeune homme qui menace les tueurs de les abattre s’ils lui font du mal. Le témoin demande aux tueurs de lui laisser le temps de prier. Et de promettre, dans sa prière: « Toi, Dieu, si tu sauves mon enfant et moi, nous te servirons« . (NDR. On apprendra, à l’occasion des questions, que ce jeune homme avait fait un rêve et qu’il avait reconnu dans la personne du témoin la femme qu’il avait vue dans son rêve.)

Le témoin continuera de raconter longuement la suite de sa fuite. Dieu exaucera sa prière.

Aucune des parties ne souhaite poser des questions tant le récit du témoin a touché tout le monde.

Maître BIJU-DUVAL tient toutefois à dire quelques mots: « Nous vous remercions infiniment d’être venue. Nous rendons hommage à votre courage pour venir décrire ce que vous avez vécu. Après 28 ans, ce doit être une grande souffrance que de raviver tous ces souvenirs. »

Une question lui est toutefois revenue à la dernière minute: « Laurent BUCYIBARUTA était-il présent à MURAMBI dans la matinée du 21 avril. Nous comprenons que dans la situation atroce que vous viviez vous n’étiez pas en état de regarder autour de vous. En Gacaca[11], certains accusés qui ont plaidé coupable ont fait courir le bruit que Laurent BUCYIBARUTA était là. Avez-vous eu connaissance de la présence de Laurent BUCYIBARUTA? »

Le témoin se contente de répondre: « Cette information émanait de toutes les cellules. »

Intervention de monsieur Laurent BUCYIBARUTA: « Je trouve que le témoin a eu beaucoup de courage. Elle a exprimé beaucoup de peine, de souffrances, à MURAMBI et dans sa fuite. Je compatis à ses souffrances. Ce sera à la Cour d’apprécier vos déclarations. »

 

Audition de monsieur Simon MUTANGANA, rescapé.

Simon MUTANGANA: Laurent BUCYIBARUTA a joué un rôle dans le génocide contre les Tutsi en 1994. J’ai perdu des enfants, mon père, des cousins, des tantes maternelles, mes beaux-parents, mes beaux-frères et beaucoup d’amis.

Président : ce qui nous importe est ce dont vous avez été témoin.

Simon MUTANGANA : nous avions fui au diocèse de KIGEME, il (le préfet) est venu nous prendre de là, disant que c’était pour assurer notre sécurité à MURAMBI. À KIGEME, nous étions bien entretenus, nous avions à manger et à boire mais quand nous avons été déplacés, dans un premier temps ils ont coupé l’eau. Nous avons souffert, là-bas, de la faim et de la soif. Après ils ont envoyé des Interahamwe[12] qui nous ont attaqués vers 3h du matin. Nous nous sommes battus en essayant de les repousser mais ça a échoué. Nous nous battions uniquement avec des pierres et des bouts de bois alors qu’ils pouvaient utiliser des balles, des grenades et des machettes. Nous sommes arrivés à l’épuisement, certains avaient été tués, d’autres avaient fui. Après que nos agresseurs ont pris le dessus sur nous, il (le préfet) est arrivé et il a demandé aux Interahamwe d’aller à CYANIKA. Ceux qui sont partis avaient les grenades et les fusils, ceux avec les machettes et les gourdins sont restés pour achever les blessés. Je n’ai plus revu Laurent BUCYIBARUTA.

Président : en 1994, quel âge aviez-vous, quelle était votre situation de famille, où habitiez-vous ?

Simon MUTANGANA : j’étais marié et j’avais des enfants.

Président : où habitiez-vous?

Simon MUTANGANA : j’habitais alors la commune de MUDASOMWA, préfecture de GIKONGORO, secteur NYAMIGIMA, cellule NYAMIGIMA.

Président : quelle distance entre votre domicile et GIKONGORO ?

Simon MUTANGANA : si je fais une estimation, environ 11 km.

Président : je me trompe ou il est exact que KIGEME est entre l’endroit où vous habitiez et GIKONGORO

Simon MUTANGANA : de KIGEME environ 7 km.

Président : pour aller de chez vous à GIKONGORO, on passe par KIGEME ?

Simon MUTANGANA : oui.

Président : vous avez parlé du diocèse de KIGEME, c’est le diocèse anglican ?

Simon MUTANGANA : Oui

Président : vous-même êtes anglican ?

Simon MUTANGANA : oui, je le suis.

Président :vous connaissiez bien l’évêque anglican ?

Simon MUTANGANA : oui, c’est KAYUMBA Norman, nous étions à l’école ensemble. Il avait un adjoint Alexis mais il est retraité aujourd’hui.

Président : dans le passé il y a eu des troubles ? Et pendant cette période, des Tutsi anglicans sont allés chercher refuge à l’église anglicane ?

Simon MUTANGANA : en 1959, ils s’y sont rendus.

Président : en 59 c’était peut-être juste une église, pas un évêché ?

Simon MUTANGANA : c’était une paroisse

Président : vous pouvez décrire un peu KIGEME ? Il y a d’autres institutions que le diocèse.

Simon MUTANGANA : il y a l’hôpital, le groupe scolaire de KIGEME, une deuxième école devenue école secondaire et un Centre de santé.

Président : il y avait des institutions militaires ?

Simon MUTANGANA : à l’époque il n’y avait pas d’établissement militaire. Le camp de gendarmerie était situé à GIKONGORO.

Président : combien de Tutsi y avait-il quand vous arrivez à KIGEME ?

Simon MUTANGANA : je fais une estimation, mais plus d’une centaine.

Président : les locaux étaient adaptés, c’était possible pour vous de rester là ou vous deviez absolument partir ?

Simon MUTANGANA : il y avait une très grande salle des élèves, nous ne la remplissions même pas.

Président : il y avait des attaques à KIGEME quand vous arrivez ?

Simon MUTANGANA : non, il n’y en avait pas jusqu’à notre départ.

Président : donc si vous allez à KIGEME c’est qu’il y a eu des troubles autour de vous, quels troubles ?

Simon MUTANGANA : le génocide avait commencé, on tuait les Tutsi. Ça avait commencé le 7, on avait tué 8 personnes. Le lendemain, ils ont tué un voisin Frédéric.  Ils ont incendié sa maison et pillé ses biens dont les vaches qu’ils ont emportées. Le 9, date à laquelle nous nous sommes rendus à KIGEME, les Interahamwe sont venus du centre de GASENGERA et MUDASOMWA, ils ont attaqué les Tutsi et les ont tués. Les rescapés se sont rendus à GIKONGORO, d’autres à KIGEME. Les collines étaient jonchées de cadavres.

Président : vous êtes parti avec votre épouse et vos enfants à KIGEME ?

Simon MUTANGANA : non, à l’arrivée des attaques, tout le monde a couru. Ils ont pris une direction à part, ils sont partis vers GIKONGORO et moi KIGEME, après avoir passé 2 jours dans la forêt.

Président : donc la famille est éparpillée.

Simon MUTANGANA : oui, mes frères, mes sœurs, ma femme et mes enfants sont allés à GIKONGORO.

Président : vous savez où ils sont allés à GIKONGORO ?

Simon MUTANGANA : non, je les croyais morts.

Président : combien de temps restez-vous à KIGEME ?

Simon MUTANGANA : je suis arrivé et le même jour, le préfet Laurent BUCYIBARUTA, le bourgmestre SEMAKWAVU et le capitaine SEBUHURA sont venus. Dès notre arrivée, ils ont dit qu’ils allaient assurer notre sécurité tous ensemble. Ils ont dit qu’ils allaient amener les gendarmes qui devaient nous conduire mais ce jour-là il ne sont pas venus. C’est le lendemain que les gendarmes sont venus nous conduire à MURAMBI.

Président : c’est difficile, mais vous avez une idée du jour ?

Simon MUTANGANA : quand nous sommes partis de KIGEME ?

Président : vous avez dit que le bourgmestre SEMAKWAVU et le capitaine SEBUHURA sont venus, c’était quand ?

Simon MUTANGANA : ce dont je me rappelle, c’est que les attaques se sont produites le 9, j’ai passé 2 jours dans la brousse et après ces 2 jours je suis arrivé au diocèse.

Président : le 9 avril il y a une attaque, vous vous réfugiez dans la brousse 2 jours et ensuite vous arrivez à KIGEME ?

Simon MUTANGANA : oui

Président : donc vous arrivez sans doute le 11 avril ?

Simon MUTANGANA : je crois que c’est ça.

Président : le 11 avril, dans votre souvenir, vous avez vu le préfet en plus du bourgmestre et du capitaine SEBUHURA ?

Simon MUTANGANA : oui, le préfet Laurent BUCYIBARUTA a même tenu un discours avant son arrivée. Il a dit aux évêques présents qu’ils allaient nous prendre.

Président : on va en discuter mais on sait que le 11 le préfet n’était pas à GIKONGORO mais à KIGALI.

Simon MUTANGANA : sauf si je me suis trompé et ça se serait déroulé le 12. Je l’ai personnellement vu.

Président : on va faire un point sur la chronologie car nous avons certains points de repères. En tout cas vous avez vu le préfet faire un point avec les évêques anglicans ?

Simon MUTANGANA:  oui, les évêques sont encore là, vous pouvez leur poser la question

Président : on le fera, nous entendrons l’évêque Norman KAYUMBA. Ce qui m’intéresse est de savoir si vous êtes passé par GIKONGORO ou directement à MURAMBI ?

Président : à ce moment-là, vous retrouvez des membres de votre famille ?

Simon MUTANGANA : j’ai vu certains, d’autres avaient déjà été tués. J’ai vu mon épouse et mes enfants.

Président : vous allez à MURAMBI à pied, dans des véhicules, comment ça se passe ?

Simon MUTANGANA : ceux qui avaient encore de la force sont partis à pied ; mais ceux qui étaient affaiblis, nous les avons transportés à bord d’un véhicule du diocèse de KIGEME.

Président : vous avez passé une nuit à l’évêché ou juste une étape ?

Simon MUTANGANA : je n’y ai pas passé la nuit, juste une étape

Président : il y avait des barrières sur la route ?

Simon MUTANGANA : elles n’étaient pas encore érigées mais on les a installées directement après notre passage. Ceux qui sont arrivés après nous ont dit qu’ils avaient dû passer par des barrières.

Président : en arrivant à MURAMBI, il y avait de l’eau courante ?

Simon MUTANGANA : de l’eau coulait encore

Président : il y avait de la nourriture ?

Simon MUTANGANA : non

Président : vous avez demandé de l’aide à ce moment-là ?

Simon MUTANGANA : certains qui étaient avec nous ont adressé une lettre au préfet qui est arrivé. Beaucoup étaient déjà morts de faim. On leur a dit que nous étions affamés, que certains étaient morts de faim, il devait nous aider. Il est parti et après il a envoyé un Blanc qui travaillait à la Caritas. Ils ont livré 3 tonnes de riz, ce qui était très peu

Président : c’était un homme ou une femme ?

Simon MUTANGANA : une Blanche. (NDR. Il s’agit de Madeleine RAFFIN, responsable de la Caritas de GIKONGORO)

Président : il sait si elle s’appelait Madeleine ?

Simon MUTANGANA : j’entendais les gens l’appeler comme ça

Président : vous avez entendu ce qu’a dit le préfet lors de sa visite ?

Simon MUTANGANA : quand il est arrivé, il a demandé qu’on recense les gens pour évaluer ce qu’il fallait leur rapporter.

Président : quand vous arrivez à MURAMBI, il y a déjà des gendarmes ?

Simon MUTANGANA : hormis ceux qui nous avaient escorté, je n’ai pas trouvé d’autres. Par contre, par après on les a envoyés pour qu’ils nous gardent.

Président : combien y en avait-il ?

Simon MUTANGANA : un petit nombre, je n’ai pas compté mais entre 8 et 10.

Président : vous vous souvenez quand vient le préfet ?

Simon MUTANGANA : environ 3 ou 4 jours après.

Président : après votre arrivée ?

Simon MUTANGANA : oui

Président : lorsque le préfet est venu, il y avait encore de l’eau ?

Simon MUTANGANA : non, il n’y avait plus d’eau.

Président : le problème a été évoqué ?

Simon MUTANGANA : oui

Président : qu’est-ce qu’il dit ?

Simon MUTANGANA : il a dit qu’il allait voir comment réparer ceci mais il n’a rien fait.

Président : ensuite, est-ce que pendant ces quelques jours, il y a des attaques ? À partir du moment où vous arrivez à MURAMBI, le camp est sécurisé ou il y a des problèmes ?

Simon MUTANGANA : à ce moment-là, deux attaques ont été menées, mais je ne me rappelle pas les dates. La première attaque est arrivée, nous nous sommes battus, ils ont reculé en face sur la colline. Nous leur avons dit: « Venez qu’on en vienne aux mains ». Finalement ils sont repartis. Le lendemain ils sont revenus et ça s’est passé comme la veille. Finalement, dans la nuit du 20 au 21, est arrivée une attaque exterminatrice qui a tué les Tutsi qui s‘étaient réfugiés à MURAMBI

Président : vous avez parlé d’un recensement. Est-ce que vous avez entendu le préfet dire qu’il fallait faire un recensement ?

Simon MUTANGANA : je l’ai entendu

Président : pourquoi fallait-il faire un recensement ?

Simon MUTANGANA : il disait que c’était pour nous apporter de la nourriture suffisante, mais ça s’entend que ce n’était pas la raison. C’est la version du préfet, mais je pense que c’était une ruse pour pouvoir savoir le nombre de gens qui s’y trouvaient.

Président : est-ce que les gendarmes envoyés à MURAMBI étaient là pour assurer la sécurité du camp ?

Simon MUTANGANA : c’est ce qu’ils disaient mais la réalité c’est qu’ils n’assuraient pas la sécurité

Président : Est-ce que le nombre de gendarmes à MURAMBI pour assurer la sécurité a changé, vous avez dit 8 ou 9 je crois ?

Simon MUTANGANA: peut-être que le nombre serait même inférieur à celui-là. La réalité c’est qu’on les a changés pour les remplacer par d’autres. MURAMBI est grand, il m’est impossible de les connaître tous.

Président : est-ce que vous avez pu sortir du camp de MURAMBI ?

Simon MUTANGANA : quand ils sont arrivés, ceux qui avaient de l’argent pouvaient sortir et aller dans une boutique derrière pour acheter de la nourriture à un commerçant et rentrer avec.

Président : est-ce que cela a pu continuer ou ça s’est arrêté ?

Simon MUTANGANA : qui avait de l’argent pouvait aller faire des achats, mais très peu en avaient.

Président : vous avez dit que des barrières s’étaient installées rapidement. Savez-vous si les gens qui étaient arrivés pouvaient passer les barrières ?

Simon MUTANGANA: une barrière a été érigée à KABEZA.

Président : à votre avis, les gens qui étaient à MURAMBI pouvaient quitter le site ?

Simon MUTANGANA: ils pouvaient aller à la boutique sans problème, mais ils évitaient d’aller loin parce que sinon les Interahamwe qui étaient un peu partout les auraient tués.

Président : vous vous souvenez s’il y a eu des visites avant l’attaque? Le préfet est-il revenu ? Le bourgmestre est revenu ? Le capitaine SEBUHURA est venu ?

Simon MUTANGANA: lorsqu’on l’avait fait venir et que nous lui disions que nous avions besoin de manger, le bourgmestre SEMAKWAVU était là, lui aussi. Ils ne sont pas revenus.

Président : est-ce que vous vous souvenez s’il y a eu une fouille qui a été faite pour savoir s’il n’y avait pas des armes ?

Simon MUTANGANA : nous étions nombreux. Moi, de là où je me trouvais, je n’ai pas vu cela.

Président : pouvez-vous nous expliquer où vous étiez dans le camp de MURAMBI ?

Simon MUTANGANA : j’étais à l’arrière dans une salle de classe du coté de là où est érigé le site du mémorial. Il y avait une salle de classe en construction à l’époque à l’endroit où est le mémorial. C’est là que mes proches et moi nous nous trouvions. Nous passions des nuits blanches en redoutant une attaque. Comme nous voyions qu’il n’y avait pas d’attaque, quand le sommeil nous prenait nous pouvions rentrer à l’intérieur et dormir un peu. Donc, de là où j’étais je n’ai pas vu de gens nous fouiller.

Président : est-ce qu’il est exact de dire que vous êtes dans le bâtiment le plus éloigné des grands bâtiments administratifs de l’entrée principale ?

Simon MUTANGANA : ce n’est pas éloigné, c’est juste en face, mais la nuit, nous, les hommes, nous restions autour du site pour que l’on ne nous attaque pas.

Président : c’est devant le bâtiment administratif ?

Simon MUTANGANA : je ne vois pas le bâtiment administratif dont vous nous parlez parce que les travaux n’avaient pas commencé. Les salles de classe que nous occupions étaient encore en construction, personne ne les occupait.

Président : s’agissant de l’attaque, j’ai compris qu’il y avait eu des attaques avec des armes. Certains avaient des fusils et des grenades. J’ai bien compris ?

Simon MUTANGANA: oui, ainsi que des machettes, des gourdins avec des clous. Certains étaient armés également de lances.

Président : est-ce qu’il y avait aussi des militaires ou est-ce que les Interahamwe et les militaires c’est la même chose ?

Simon MUTANGANA : non, ce n’est pas la même chose, les Interahamwe ce sont des civils à qui on a appris le maniement des armes. C’étaient des membres du parti MRND[13] ou de la CDR[14]. Ce sont eux à qui on avait appris le maniement des armes. Mais des gendarmes on fait aussi partie de ces attaques.

Président : beaucoup ?

Simon MUTANGANA : difficile à dire. Ils étaient tellement nombreux, impossible de dire le nombre. Toujours est-il que les Interahamwe étaient les plus nombreux

Président : est-ce que certains attaquants avaient des tenues particulières ?

Simon MUTANGANA : à un certain moment ils ont porté des feuilles de bananiers afin de se camoufler.

Président : des herbes aussi ?

Simon MUTANGANA : ce sont ces feuilles de bananier qui les caractérisaient, c’était pour que, s’ils devaient se retrouver avec quelqu’un qui ne les portait pas, en déduire que c’était un Tutsi et donc le tuer.

Président : est-ce qu’ils criaient, chantaient, il y avait des sifflets ? Que pouvez-vous nous dire ?

Simon MUTANGANA : ils sont venus silencieux pour que nous ne puissions pas le savoir. Par contre, ce que nous avons entendu, c’est le bruit des engins explosifs.

Président : est-ce qu’à un moment vous voyez des autorités sur place ?

Simon MUTANGANA: le colonel SIMBA[15], le sous-préfet HAVUGA, le bourgmestre SEMAKWAVU de NYAMAGABE, le bourgmestre de MUDASOMWA, le directeur de l’usine de thé, David KARANGWA (greffier du Tribunal).

Président : il y avait un dénommé Alphonse GASANA ?

Simon MUTANGANA: GASANA était là. On le surnommait « BIHEHE » (la hyène). Il s’était qualifié lui-même de major et portait des habits militaires alors que c’était un civil.

Président : toutes ces autorités étaient là dès le début de l’attaque, au milieu, sont-elles restées jusqu’à la fin ?

Simon MUTANGANA : quand je les ai vus, il faisait déjà jour. La nuit je ne pouvais pas les voir.

Président : vous les voyez de jour mais vous ne savez pas si ces autorités-là étaient là avant ou pas ?

Simon MUTANGANA : on voyait les véhicules avec des Interahamwe venir et partir mais avant je ne les ai pas vus.

Président : comment pouvez-vous affirmer que c’était ces autorités ? Vous les avez vus, on vous l’ a dit, vous avez deviné?

Simon MUTANGANA: c’est ce que j’ai personnellement vu. Lorsque nous étions en train de les affronter, nous courrions vers eux en leur lançant des pierres. Quand les Interahamwe lançaient des grenades, nous retournions en arrière. J’ai vu certains à entre 50 et 100 mètres et d’autres entre 30 et 50 mètres.

Président : qu’est-ce qui vous permet d’affirmer que c’était bien le préfet Laurent BUCYIBARUTA ?

Me BIJU-DUVAL et Me LÉVY : il ne l’a pas nommé.

Président : au temps pour moi. Il a vu le préfet alors ?

Simon MUTANGANA: le préfet est arrivé quand nous étions déjà affaiblis et c’est à ce moment-là qu’il a demandé aux Interahamwe armés de fusils et grenades de partir à CYANIKA

Président : donc vous l’avez vu après ?

Simon MUTANGANA: je l’ai vu après que les gens soient tués en nombre.

Président : les autres autorités, vous les voyez avant ou en même temps ?

Simon MUTANGANA : le bourgmestre de SEMAKWAVU et celui de MUDASOMWA sont venus ensemble mais avant ils étaient aussi-là. C’est eux que je voyais à une distance d’une centaine de mètres. C’est à ce moment-là que sont arrivés aussi SIMBA, KAMODOKA et HAVUGA, le bourgmestre.

Président : d’abord vous reconnaissez les bourgmestres de NYAMAGABE et MUDASOMWA et ensuite SIMBA, le colonel ?

Simon MUTANGANA : oui, le colonel, il était avec eux

Président : vous voyez le sous-préfet HAVUGA ?

Simon MUTANGANA : oui

Président : et le préfet Laurent BUCYIBARUTA ?

Simon MUTANGANA : oui

Président : le préfet était à la même distance que les autres ?

Simon MUTANGANA : je l’ai vu après celui-là.

Président : vous le voyez à quelle distance ?

Simon MUTANGANA : je dirais entre 30 et 50 mètres?

Président : comme les autres ?

Simon MUTANGANA : les autres entre 50 et 100 mètres environ.

Président : quelle était l’attitude du préfet ?

Simon MUTANGANA : ce que je vous dirais c’est que l’ai vu d’abord à KIGEME et ensuite à MURAMBI, je n’ai pas d’autres informations.

Président : il me semble que tout à l’heure, il a été question d’aller à CYANIKA. Si j’ai bien compris, c’était à l’instigation du préfet.

Simon MUTANGANA : oui, il est arrivé, il a vu les corps jonchant le sol et il a demandé aux Interahamwe armés d’armes à feu de se rendre à CYANIKA.

Président : vous avez pu voir si le préfet était assez près de ce triste spectacle ? Quelle était sa réaction ?

Simon MUTANGANA : on voyait que ça le satisfaisait puisqu’on le voyait qui faisait un hochement approbateur de la tête en disant:« C’est bon, venons maintenant à CYANIKA ».

Président : vous l’avez entendu ou vous avez deviné ?

Simon MUTANGANA : ce sont des choses que j’ai entendu de mes oreilles.

Président : selon vous, combien de personnes ont été tuées ce jour-là ?

Simon MUTANGANA : je ne sais pas mais ceux qui sont restés là ont été tués. On était environ 50 000 réfugiés, voire plus.

Président :vous souhaitez ajouter autre chose ?

Simon MUTANGANA : les gens qui ont joué un rôle dans le massacre de ces personnes, certains circulent toujours impunément à gauche à droite, je voudrais demander qu’ils soient arrêtés et traduits en justice, qu’ils soient sanctionnés pour cela. C’est que nous autres, les victimes, nous devrions bénéficier de dommages et intérêts.

 

Juge assesseure 1 : une question sur la chronologie. Vous avez, dit monsieur. que vous étiez arrivé à KIGEME le 9 avril, que le préfet est arrivé ce même jour.

Simon MUTANGANA: pas le 9 puisque c’est à cette date que les gens ont commencé à être tués chez nous, dans ma cellule, et j’ai passé 2 ou 3 jours dans la brousse.

Juge assesseure 1 : il me semble que vous avez dit ça et que les gendarmes sont arrivés le lendemain ?

Public : mais non!

Juge assesseure 1JA 1 : donc vous arrivez le 11 dans tous les cas ?

Public : le 12

Juge assesseure 1 : donc le 11 ou le 12 ?

Simon MUTANGANA : le 9 on était chez nous.

Juge assesseure 1: sur l’attaque principale, vous dites que l’attaque démarre la nuit et que vous pouvez voir les autorités quand le jour se lève. À quelle heure se lève le jour à peu près ?

Simon MUTANGANA : entre 6h et 7h.

Juge assesseure 1 : vous avez dit que le préfet est arrivé après quand vous étiez un peu fatigués. Vous pouvez situer quand c’était, dans la journée, si vous vous souvenez ?

Simon MUTANGANA :  le matin

Juge assesseure 1 : mais vous avez dit quand vous étiez fatigués, qu’ il  y avait déjà beaucoup de morts.

Simon MUTANGANA : étaient déjà morts ceux qui les avaient combattus. Les femmes et les enfants étaient encore vivants. Nous avions commencé à nous battre à 3h du matin et nous étions déjà épuisés.

 

QUESTIONS des Parties Civiles :

 

Me KARONGOZI : j’aimerais demander au témoin comment se fait-il que dans toute la préfecture les violences commencent dans cette localité de NYAMAGABE?

Simon MUTANGANA : c’est à cause du directeur KAMODOKA de l’usine de KITABI, en collaboration avec d’autres membres de la CDR. Ce sont ceux-là qui ont entrainé les Interahamwe à cette usine-là à thé et des fois dans la forêt de NYUNGWE.

Me KARONGOZI : si j’ai bien compris, vous dites que les Interahamwe qui attaquent viennent en partie de cette localité de MUDASOMWA ?

Simon MUTANGANA : oui, en étant rejoints par d’autres venant de KIGEME et GIKONGORO.

Me KARONGOZI : vous êtes au courant que les Interahamwe de MUDASOMWA ont aussi attaqué à KIBEHO ?

Simon MUTANGANA : ce sont ces Interahamwe de MUDASOMWA qui ont été entrainés et qui ont attaqué MUDASOMWA et KARAMA aussi.

 

QUESTIONS du Ministère Public :

 

Ministère Public : vous avez estimé qu’étaient présents environ 50 000 réfugiés. Vous avez aussi évoqué un recensement effectué. Lors de vos nombreuses auditions au cours de la procédure, vous aviez donné un nombre très précis grâce à ces recensements justement. Vous vous en souvenez malgré le temps ?

Simon MUTANGANA : je ne m’en souviens pas mais du jour de notre arrivée au jour du massacre, les réfugiés n’ont cessé d’affluer.

Ministère Public : je vais vous rappeler les chiffres que vous aviez donné – D10330 :  49500 devant le le juge d’instruction  et 48 600 devant le TPIR. Ça vous semble cohérent ?

Simon MUTANGANA : je me rappelle pas des chiffres mais d’autres ont continué à affluer. Si on compte ces derniers, on serait à 50 000 ou plus.

Ministère Public : vous aviez du mal à répondre à Mme l’assesseur sur l’heure d’arrivée du préfet à MURAMBI. Vous avez dit devant le TPIR  qu’il est arrivé vers 6h du matin ; devant le juge d’instruction, 7h du matin,  et lors de la confrontation, entre 7 et 8h. Donc on peut dire qu’il arrive entre 6h et 8h du matin ?

Simon MUTANGANA: je ne portais pas de montre pour être précis. Ensuite? la situation était difficile et critique.

Ministère Public : je comprends mais vous êtes quand même cohérent sur les horaires. Vous vous souvenez être allé sur le site de MURAMBI avec la juge d’instruction pour faire une sorte de mise en situation. Vous vous êtes placé là où vous étiez le matin, où vous avez vu le préfet Laurent BUCYIBARUTA.

Simon MUTANGANA : je m’en souviens, je pourrais m’y replacer aujourd’hui.

Ministère Public : les gendarmes ont mesuré la distance entre là où vous vous étiez placé et là où vous aviez vu le préfet Laurent BUCYIBARUTA: elle était de 47,40 m – D10384/93. Ça vous semble cohérent ?

Simon MUTANGANA : oui, puisque j’ai dit entre 30 et 50 mètres.

Ministère Public: avez-vous été témoin de l’ensevelissement des corps ?

Simon MUTANGANA : je suis sorti des cadavres de MURAMBI et je suis descendu. Je suis resté 2 jours : le premier, ils ont tué toute la journée sous mon regard ; le lendemain, les Interahamwe sont venus tuer ceux qui sont restés sur place. Ensuite, le bulldozer est venu pour l’enfouissement. Quand ils ont amené un bulldozer, ils ont creusé puis les camions-bennes déversaient des cadavres, je les voyais.

 

QUESTIONS de la  Défense :

Me BIJU-DUVAL : je voudrais revenir sur le moment où vous dites avoir vu le préfet Laurent BUCYIBARUTA un matin entre 6 et 8h. Vous avez participé à une mise en situation et vous indiquez vous placer devant le bâtiment principal, devant ce qui est aujourd’hui une stèle, un mémorial. Vous confirmez ce positionnement ?

Simon MUTANGANA : ce que je confirme, c’est que c’était entre 6h et 8h du matin. C’était la catastrophe.

Me BIJU-DUVAL – D10384/8 : et vous étiez dans ce qu’on peut appeler la cour du centre de MURAMBI, on est d’accord ?

Simon MUTANGANA : c’est exact

Me BIJU-DUVAL : j’ai cru comprendre que vous étiez au milieu des cadavres, c’est ça ?

Simon MUTANGANA : j’étais couché, autour de moi il y avait des cadavres.

Me BIJU-DUVAL : d’accord. Selon votre témoignage, c’est dans cette position-là que vous auriez vu le préfet Laurent BUCYIBARUTA à 30 ou 50m, c’est ça ?

Simon MUTANGANA: oui

Me BIJU-DUVAL : je voudrais rappeler à votre intention des déclarations que vous avez faites au Parquet de GIKONGORO le 17/08/2001– D132.

D’abord, êtes-vous d’accord pour dire que les plants de sorgho sont une excellente cachette à cette époque car les plans sont très hauts ?

Simon MUTANGANA: c’est la question ?

Me BIJU-DUVAL : oui. On est d’accord pour dire que pendant le génocide, c’était l’une des rares cachettes possibles.

Simon MUTANGANA : oui. À ce moment-là, ils ont couru derrière nous, ils m’ont lancé une pierre et ensuite je suis allé dans le champ de sorgho.

Me BIJU-DUVAL : dans votre audition vous dites que c’est depuis ce champ de sorgho que vous voyez le préfet Laurent BUCYIBARUTA. On est d’accord pour dire que ce champ n’a rien à voir avec la cour du camp de MURAMBI ?

Simon MUTANGANA : ce que je vous dis c’est que ce champ de sorgho était en contre-bas de la cour, je suis sorti des cadavres pour m’y rendre.

Me BIJU-DUVAL : donc pourquoi avoir dit lors de la mise en situation que vous étiez dans la cour lorsque que vous auriez vu le préfet Laurent BUCYIBARUTA ? On est d’accord que ce sont deux endroits totalement différents ?

Simon MUTANGANA : ce que je vous ai dit est que je l’ai vu sur le terrain et ensuite j’ai quitté cet endroit pour aller dans le champ de sorgho tout près de là.

Me BIJU-DUVAL : je comprends que vous tentez de rendre compatibles DEUX auditions opposées mais je vais passer. Je comprends que vous dites avoir entendu de vos propres oreilles les propos tenus par le préfet Laurent BUCYIBARUTA demandant aux Interahamwe de se rendre à CYANIKA, c’est ce que vous avez dit aujourd’hui. Est-ce que vous vous souvenez que le 30/09/2014, lorsque vous êtes entendu par le juge d’instruction vous indiquez autre chose – D10620/6.

Voilà donc deux affirmations totalement différentes. Quelle est la vérité ?

Simon MUTANGANA : le préfet? je l’ai entendu de mes propres oreilles quand il est venu

Me BIJU-DUVAL : alors pourquoi vous avez dit le contraire au juge d’instruction ?

Simon MUTANGANA : je me souviens pas mais je confirme ce que je vous ai dit aujourd’hui.

Me BIJU-DUVAL : une précision sur un autre point. Vous nous avez parlé du colonel Aloys SIMBA[16] qui aurait été sur les lieux. Vous pouvez préciser s’il arrive avant ou après le préfet ?

Simon MUTANGANA : il est arrivé après que les autres soient épuisés

Me BIJU-DUVAL : D 588/30 – lors de cette audition, vous indiquez que M. Aloys SIMBA serait arrivé 1h plus tard que le préfet. Est-ce que véritablement vous avez un souvenir précis et sincère de ces évènements-là et de l’arrivée de ces personnes-là ?

Simon MUTANGANA : ce que je me dis, c’est que c’est SIMBA qui est arrivé le premier.

Me BIJU-DUVAL : alors pourquoi avoir dit le contraire à l’enquêteur du TPIR ?

Simon MUTANGANA : ce que je dis aujourd’hui  est exact.

Me BIJU-DUVAL : est-il exact que depuis 1994, vous avez eu l’occasion de vous exprimer à plusieurs reprises sur les faits de MURAMBI ?

Simon MUTANGANA : les journalistes venaient me voir très souvent

Me BIJU-DUVAL : les journalistes sont très souvent orientés vers vous pour que vous racontiez ce qui s’est passé à MURAMBI ?

Simon MUTANGANA : les journalistes rwandais et étrangers sont venus me voir à différents moments.

Me BIJU-DUVAL : voilà, est-il exact que vous vous exprimez dans le journal La nouvelle relève au mois d’avril 2011 ?

Simon MUTANGANA : je ne peux pas me rappeler exactement des dates et des journaux, ils sont venus à plusieurs reprises.

Me BIJU-DUVAL : vous vous souvenez de cette rencontre du 7 avril 2007 ? Est-il exact que vous êtes intervenu aux côtés du Président Paul KAGAME en avril 2007 ?

Simon MUTANGANA : je me souviens pas de la date mais j’ai eu à prendre la parole alors que lui aussi était là.

Président : je donnerai la parole à M. Laurent BUCYIBARUTA éventuellement la semaine prochaine.

 

Audition de madame Julienne UMUGWANEZA, rescapée.

Nous avons assisté à une très longue déposition du témoin. Fatigue aidant, il ne m’a pas été possible de noter tous les propos. Ce compte-rendu pourrait être complété si d’autres personnes ont pu prendre des notes. Veuillez m’en excuser d’avance.

« Je vais vous faire part de ce qui m’est arrivé pendant le génocide. Après l’attentat du 6 avril, dès le 7 un communiqué nous demandait de rester chez nous. Je suis restée à la maison avec mes parents. Nous avons tous eu très peur toute la journée. Nous n’avons rien pu manger ni faire quoi que ce soit. J’avais 16 ans. Mes parents nous ont demandé d’avoir voir au Centre ce qui se passait en faisant semblant d’aller puiser de l’eau. Nous avons trouvé là un attroupement: commerçants, voyous Interahamwe. Ces gens avaient des armes, des lances, des haches. Ils nous ont apostrophés: « Vous n’avez pas honte de venir jusqu’ici? »

Nous avons rebroussé chemin pour raconter tout cela à nos parents. Un oncle paternel, commerçant, a suggéré que nous ne restions pas à la maison. Dans la nuit, nous avons entendu des coups de feu en provenance de la maison de Jean NTWALI. Sa maison était en feu et il venait d’être tué.

Les voyous ont incendié la maison d’un certain Callixte GASANA et sont venus jusques chez nous. Nous nous sommes cachés dans les champs de sorgho puis sommes partis jusqu’au bureau communal de MUNYASOMWA. Le bourgmestre n’a rien fait et nous a demandé de rester sur place. A 20 heures, les Interahamwe sont arrivés pour nous tuer. Les policiers communaux se sont placés entre eux et nous. Lorsque le bourgmestre est revenu, GASANA et MUSERAMANZI lui ont demandé de nous aider à rejoindre l’évêché de GIKONGORO. Nous sommes partis sous protection policière. On nous a installés dans les classes occupées par CARITAS (NDR. Section locale du Secours Catholique dont Madeleine RAFFIN était responsable.) Nous avons passé là un certain nombre de jours, rejoints par beaucoup d’autres.

C’est alors que des gendarmes sont venus nous dire de nous rendre à MURAMBI. Forcés de partir, nous avons cheminé en convoi. A notre arrivée sur le site, il y avait de l’eau qui sera coupée par la suite. Il nous était interdit de nous rendre aux boutiques.

Des enfants ont commencé à mourir. Nous avions soif, la situation allait de mal en pis. Les gendarmes ont été remplacés par des militaires qui nous regardaient d’un œil méchant. Nous avons passé la nuit debout et avons vu des camions arriver de MUDASOMWA. 

Au lever du jour, les jeunes réfugiés ont lancé des briques sur les attaquants. Les soldats tiraient des balles et lançaient des grenades. Cachée dans une des classes, je m’interrogeais: « Est-ce que je vais rester ici voir mes parents se faire découper? » Je me rends dans une classe voisine pour y prendre la clé et fermer notre classe. J’ai conservé la clé pendant que les tueurs, à l’extérieur, continuaient leur travail. (NDR. Le témoin, apparemment, se trouve dans la même salle que Juliette MUKAKABANDA qui a témoigné avant elle.)

Les Interhamwe se plaignent que les gens soient encore en vie. Un blessé demande qu’on ouvre la porte pour mourir plus vite. Je reconnais un homme qui est armé d’un gourdin. Un autre a pris l’agent d’une femme qu’il tue avec son enfant. Madame UMUGWANEZA implore: « Aie pitié de moi! »

Le reste de son récit sera la narration d’un véritable chemin de croix.

Mémorial de Murambi, ancienne ETO (École Technique Officielle) où près de 50 000 Tutsi ont été assassinés lors de l’attaque du 21 avril 1994 (doc. genocidearchiverwanda.org.rw)

 

Président : est-ce que oui ou non VOUS avez vu Laurent BUCYIBARUTA à un moment quelconque ?

Julienne UMUGWANEZA : oui une autre fois je l’ai vu. Voyez-vous, on voyait le véhicule et les gens disaient « Ce véhicule est au préfet ».

Président : c’était où ?

Julienne UMUGWANEZA: à MURAMBI. Il y avait deux véhicules. Il y avait le capitaine responsable de la gendarmerie. Ces véhicules sont repartis car on dit que les grenades tuaient trop de gens. Une voiture au préfet BUCYIBARUTA et l’autre à SEBUHURA.

Président : la première fois que vous évoquez Laurent BUCYIBARUTA, c’est quand vous êtes à l’école à côté de la cathédrale ?

Julienne UMUGWANEZA : oui, on a été déplacés.

Président : vous dites qu’il y a un ordre pour qu’on les conduise au camp de MURAMBI ?

Julienne UMUGWANEZA : oui

Président : vous avez entendu les gens autour de vous dire que l’ordre venait du préfet ?

Julienne UMUGWANEZA : oui ; les gendarmes ont dit:  « Le préfet a dit de vous emmener à MURAMBI. »

Président : mais vous ne l’avez pas vu?

Julienne UMUGWANEZA : à part l’entendre dire, il y avait trop de gens

Président : on vous a dit si le préfet était là ?

Julienne UMUGWANEZA : ils ont dit qu’il avait donné l’ordre de nous amener mais personne ne s’en est occupé. Nous avions peur et étions perdus.

Président : vous partez à MURAMBI sur ordre du préfet mais vous ne l’avez pas vu ?

Julienne UMUGWANEZA :  il y avait beaucoup de véhicules là où nous étions.

Président : vous évoquez un deuxième épisode où vous êtes à MURAMBI. Cette fois-ci il y a beaucoup de monde avec deux véhicules : celui du préfet et du capitaine SEBUHURA. Vous avez vu Laurent BUCYIBARUTA ?

Julienne UMUGWANEZA : les adultes présents disaient que c’était le véhicule du préfet, moi je ne pouvais pas m’approcher pour regarder.

Président : donc pas de certitude sur sa présence ?

Julienne UMUGWANEZA : on disait que c’était son véhicule, je ne pouvais pas m’approcher.

Président : je cherche juste à comprendre, je ne vous fais pas de reproches.

Julienne UMUGWANEZA : si on vous dit que tel véhicule est celui du préfet, on suppose que c’est lui dedans ; c’est comme celui du Pape.

Président : mais vous ne l’avez pas vu ou entendu directement ?

Julienne UMUGWANEZA : j’ai vu le véhicule mais je ne l’ai pas vu

Président : vous avez pu approcher ou voir Laurent BUCYIBARUTA à d’autres occasions ?

Julienne UMUGWANEZA : je ne l’ai jamais approché, je n’étais qu’une jeune étudiante. Mais pendant les examens, on pouvait nous poser des questions sur le procès, il figurait aussi dans les journaux.

Président : on vous a entendue à plusieurs reprises, notamment lors de l’audition par les gendarmes français. À cette occasion, vous avez notamment dit que vous aviez souvenir d’une réunion à laquelle le Président SINDIKUBWABO[17] avait participé.

Julienne UMUGWANEZA : oui, mais c’était avant MURAMBI.

Président : combien de temps avant?

Julienne UMUGWANEZA : je me souviens pas des dates

Président : mais vous avez vu vu ou entendu dire ?

Julienne UMUGWANEZA : nous étions des enfants, nous avons suivi pour écouter aux portes des gens qui venaient aux réunions. Un garçon qui était avec nous nous a rapporté qu’on avait dit à la réunion qu’il fallait rassembler les gens avant de les tuer : « Rassembler les branchages avant de mettre le feu ».

Président : mais vous n’étiez pas là.

Juge assesseure 1 : lors de votre audition par les gendarmes français, vous avez dit qu’avant votre arrivée au camp de MURAMBI, l’eau avait été fermée et on vous avait empêché de faire des courses. J’ai compris que vous sortiez du camp pour aller chercher de l’eau par une brèche et qu’à un moment, les militaires ont encerclé la brèche pour que vous ne passiez plus, c’est ça ?

Julienne UMUGWANEZA : oui

Juge assesseure 1: vous avez dit avoir entendu le préfet venir au camp, accompagné de militaires et de gendarmes avec le capitaine SEBUHURA. Vous avez dit que lors de cette visite « il, je pense que c’est le préfet, a obligé les personnes qui se trouvaient à bord du véhicule de casser les robinets d’eau pour que les réfugiés meurent de soif ». Vous avez vu cette scène ou on vous l’a racontée ?

Julienne UMUGWANEZA : il y avait beaucoup d’autorités qui venaient. Quand on est un enfant, on va voir ce qui se passe et on écoute ce que disent les autorités. Il y a même eu un recensement. Je ne me souviens pas très bien mais je sais que beaucoup d’autorités venaient.

Juge assesseure 1:: Madame, vous venez de dire à l’instant que vous n’avez vu que de loin un véhicule du préfet.

Julienne UMUGWANEZA : oui

Juge assesseure 1: : vous comprenez que c’est une contradiction de dire après que vous l’avez entendu dire qu’il fallait couper l’eau.

Julienne UMUGWANEZA : voyez-vous, quand il est venu, il y avait l’eau courante, quand il est parti il n’avait plus l’eau courante. On a dit que c’était sa faute.

Juge assesseure 1: : je vous demande, car j’avais compris, moi, qu’il n’y avait déjà plus l’eau courante quand vous êtes arrivée.

Julienne UMUGWANEZA : vous comprenez, quand on est arrivé il y avait l’eau courante, les autorités ont demandé combien nous étions. Ensuite il n’y avait plus l’eau courante, les adultes ont dit que c’était le préfet qui avait donné l’ordre de couper l’eau.

Juge assesseure 2: : avez-vous été témoin des opérations d’ensevelissement des corps ?

Juge assesseure 1: : ça fait très longtemps, il faut aller doucement pour se rappeler. Je me rappelle que quand on les a tués, je me cachais dans les champs de sorgho. Ensuite, deux engins sont arrivés et quand je suis partie, ils creusaient encore. Je n’ai pas passé la nuit sur place. Les engins sont venus juste après le massacre. Je n’ai pas vu l’ensevelissement.

Pas de question de la Défense.

 

Alain GAUTHIER, président du CPCR

Mathilde LAMBERT et Fade FRISCHIT

Jacques BIGOT pour les notes et la mise en page.

  1. Interahamwe : « Ceux qui combattent ensemble » ou « qui s’entendent », mouvement de jeunesse et milice recevant une formation militaire, créé en 1992 par le MRND, le parti du président HABYARIMANA. Voir FOCUS – Les Interahamwe.[]
  2. RTLM : Radio Télévision Libre des Mille Collines – cf. Focus : LES MÉDIAS DE LA HAINE[]
  3. FPR : Front patriotique Rwandais[]
  4. Inkotanyi : combattant du FPR (terme utilisé à partir de 1990). Cf. glossaire.[]
  5. ETO : Ecole Technique Officielle.[]
  6. MDR : Mouvement Démocratique Républicain, voir glossaire[]
  7. PSD : Parti Social Démocrate[]
  8. TPIR : Tribunal Pénal International pour le Rwanda, créé à Arusha (Tanzanie) par la résolution 955 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, le 8 novembre 1994 (en anglais ICTR).[]
  9. Ibid.[]
  10. ADEPR : Association des Églises de Pentecôte au Rwanda[]
  11. Gacaca : (se prononce « gatchatcha »)
    Tribunaux traditionnels au Rwanda, réactivés en 2001 et opérationnelles à partir de 2005, en raison de la saturation des institutions judiciaires pour juger des personnes suspectées de meurtre pendant le génocide. Composées de personnes élues pour leur bonne réputation, les Gacaca avaient une vocation judiciaire et réconciliatrice, favorisant le plaider coupable en contrepartie de réduction de peines. Près de 2 millions de dossiers ont été examinés par 12000 tribunaux gacaca avant leur clôture officielle le 18 juin 2012.
    Cf. glossaire.[]
  12. Ibid. []
  13. MRND : Mouvement Républicain National pour la Démocratie et le Développement, ex-Mouvement révolutionnaire national pour le développement, parti unique de 1975 à 1991 fondé par Juvénal HABYARIMANA.[]
  14. CDR : Coalition pour la défense de la République, parti Hutu extrémiste, créé en mars 1992, au moment des massacres de Tutsi dans le Bugesera. La CDR a également une milice, les Impuzamugambi., cf. glossaire[]
  15. Aloys SIMBA : officier à la retraite au moment du génocide, chef de la défense civile dans les préfectures de Butare et Gikongoro, condamné par le TPIR à 25 ans de prison pour « génocide et extermination, crimes contre l’humanité »[]
  16. Ibid.   []
  17. Théodore SINDIKUBWABO : Président du GIR (Gouvernement Intérimaire Rwandais) pendant le génocide. Voir Focus – L’État au service du génocide[]

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