- Audition de M. Patrick BARAHIRA, fils de l’accusé.
- Audition de M. Jeochonias MUTABAZI, frère de BARAHIRA, en visioconférence.
- Audition de Mme Sandrine CLAMAGIRAND, officier de gendarmerie.
- Audition de M. Pierre PÉAN, cité par la défense.
Audition de Patrick BARAHIRA, fils de l’accusé.
Le témoin commence son audition par un long préambule dans lequel il exprime sa compassion pour les victimes « de cette tragédie qui a frappé notre cher pays… » Il continue en évoquant le besoin de pardonner, de tourner la page en vue d’une réconciliation. Il exprime ensuite sa totale confiance en la justice française en espérant que seront jugés tous les « crimes commis contre le peuple tutsi, le peuple hutu et le peuple twa !».
Le témoin de continuer en évoquant la première fois où il a appris que son père était poursuivi : « Ce fut un choc. » Ce n’était pas le père qu’il avait connu, lui qui n’a jamais montré de haine envers les Tutsi.
Et de conclure sa déclaration spontanée en avouant que ce n’est « pas facile à porter », qu’il fait confiance en la justice française indépendante, « même s’il peut y avoir des pressions ».
La présidente demande au témoin de rappeler les circonstance de leur fuite en Tanzanie, jusqu’au camp de Benako où régnait une sécurité relative : il n’a jamais eu de menaces. Son père ne possédait aucune arme : une machette pour les travaux finira-t-il par reconnaître. Ce n’est que plus tard, en Tanzanie, qu’il entendra parler de génocide.
Madame Aurélie BELLIOT, pour l’accusation, évoque le comportement de son père au cours de la première semaine : quant au comportement de son père pensant la semaine du génocide où ils étaient encore à Kabarondo, il ne peut pas dire grand chose sinon qu’il s’absentait pour aller chercher à manger et surveiller ses biens.
Au tour de monsieur BERNARDO d’intervenir en demandant quelle image il gardait de son père. « Il assumait son rôle protecteur, s’est toujours soucié de nous. Il était apprécié, avait été un maire populaire et respecté. Des gens venaient nous visiter à la maison mais il n’a jamais cherché à nous intéresser à la politique. Je suis fier de lui ». En fuyant, le témoin déclare que le FPR était tout près, mais il n’a pas vu de soldats: des bruits d’armes seulement. Ils ont fui à pieds, au cœur d’une foule.
Maître BOURGEOT, l’avocate de son père, prend des nouvelles de sa mère : elle a assez mal vécu son audition lors du procès en première instance. Elle lui fait aussi préciser la topographie des lieux, l’emplacement de la maison par rapport à la route (NDR. La maison de BARAHIRA était située un peu en-dessous de la route, à gauche en allant sur Kibungo, en dessous d’une petite forêt d’eucalyptus.)
A-t-il perdu des gens de sa famille? Quelques membres de sa famille maternelle. D’autres seraient morts après le génocide! On ne connaît pas les circonstances.
A-t-il gardé des contacts à Kabarondo? Il a contacté des témoins mais ils ont peur de parler. Certains ont refusé de parler!
Son père? Discret, ne parle pas beaucoup, généreux, courageux. Il était ami avec NGENZI.
Audition de monsieur Jeochonias MUTABAZI, frère de BARAHIRA, en visioconférence.
Comme le témoin ne sait pas comment commencer son audition, madame la présidente va le soumettre à une série de questions auxquelles il aura parfois du mal à répondre. Si son frère a démissionné de sa fonction de bourgmestre, c’était « sa propre volonté ». On n’en saura pas plus. Il habitait à Rugazi, près de Cyinzovu, voyait souvent son frère et ne sait rien sur ses activités politiques. S’il n’a pas fui, c »est parce qu’il était malade. C’est aussi pour cela qu’il n’a pas participé à la réunion sur le terrain de foot: il ne sait d’ailleurs pas qui l’a convoquée. Il n’a jamais été blessé, rien ne lui a fait peur. Il n’a assisté à aucun massacre, il est resté chez lui. Les massacres à l’église? Il en a entendu parler, mais plus tard! Il ne se souvient pas combien de gens peuplaient la cellule de Rugazi : il ne pouvait pas les compter. Des morts, il n’y en a pas eu dans la cellule.
La présidente lui apprend qu’il est en train de parler devant la Cour d’assises de Paris : il ne savait pas que le procès était en cours.
Aux questions de maître PARUELLE, il répond que s’il n’avait pas été malade, il aurait fui, comme tout le monde : c’était la guerre, personne ne disait de fuir. Il a bien entendu des bruits de tirs de là où il était.
Monsieur BERNARDO interroge à son tour le témoin. Le témoin a appris l’attentat aux informations. Quant à BARAHIRA, il possédait une forêt et des maisons. La famille a récupéré ses biens qui sont gérés par son neveu, NSENGIMANA.
Maître BOURGEOT cherche à savoir comment il est venu à Kigali. C’est le Parquet qui l’a convoqué. Il ne sait même pas que son frère est dans la salle. Il est amené à dire qu’il est seul dans la salle où se fait la visioconférence. Ce n’est que lors de la collecte d’informations par les Gacaca [1] qu’il a appris que son frère était accusé. On aura du mal à savoir par contre comment seraient morts certains de ses frères! Une de ses sœurs, Juliette TABITA a aussi été incarcérée à son retour, mais il ne sait pas pourquoi. Il termine ne adressant un bonjour à son frère qu’il n’a pas revu depuis 1994.
Audition de madame Sandrine CLAMAGIRAND, officier de gendarmerie.
Le témoin a travaillé sur les dossiers du génocide de mars 2011 à août 2016 au cours de seize déplacements au Rwanda. Elle va développer les conditions dans lesquelles se sont déroulées les auditions de témoins. Ils intervenaient toujours en binômes, se relayant dans les auditions ou la recherche des témoins. Elle évoque sa collaboration avec les membres du GFTU, section du parquet de Kigali en charge des fugitifs. malgré la présence permanente d’un officier de police judiciaire, en la personne de Méthode RUBAGUMYA, ils ont toujours pu travailler en toute liberté et indépendance. L’OPJ rwandais ne participait jamais aux auditions qui se faisaient à partir d’un canevas préétabli. Ils ont toujours fait attention au choix des interprètes. Les enquêteurs avaient le souci de vérifier la véracité des témoignages qu’ils recoupaient souvent entre eux.
Questions de madame la Présidente auxquelles répond le témoin. « Pour aborder un tel dossier, on s’attache aux faits. » Pour se familiariser avec le contexte, on discute sur place avec les policiers du GFTU, on lit des documents, ceux du TPIR, des livres, on regarde des films. Personnellement, elle a surtout travaillé dans l’Est du Rwanda, dont quatre sur Kibungo. Elle revient sur sa liberté totale de travailler: « On arrivait à faire ce qu’on voulait. » Au cours de ses investigations, elle a été amenée à rencontrer des collègues belges, canadiens… Le témoin précise qu’à Kabarondo les lieux n’ont subi que des modifications peu significatives.
Madame la présidente s’étonne qu’on ne possède aucune photo de la maison de BARAHIRA alors qu’on en a beaucoup d’autres. Le témoin reconnaît qu’elle n’a travaillé que ponctuellement sur cette affaire. Elle n’a pas le souvenir d’avoir rencontré des difficultés venant du parquet de Kigali. Par contre, aucune distinction entre Hutu et Tutsi lors des auditions, même si on leur demander de préciser leur « ethnie ». Le témoin de redire qu’ils avaient de bonnes relations avec les autorités locales, question de « rentabiliser les missions« . Et de bien préciser qu’ils étaient soucieux de la confidentialité des auditions. Ces rencontres duraient longtemps.
Des témoins pouvaient répondre pour plaire. Mais habitude de recouper les témoignages. Quant aux récompenses, nous n’en donnions jamais, contrairement à certains enquêteurs étrangers qui avaient donné la mauvaise habitude de « rétribuer » les témoins. Les témoins incarcérés, ils les faisaient généralement extraire de leur prison pour les interroger.
Quand les témoins utilisaient le verbe « travailler », il s’agissait bien de « tuer ». « Se mettre en sécurité » faisait allusion au fait que les gens se réfugiaient dans les églises, traditionnellement des lieux de protection, ou qu’on les y rassemblait.
Au tour de maître LAVAL d’interroger le témoin. Il souhaiterait connaître l’impression du témoin quant à la crédibilité des personnes interrogées. Madame CLAMAGIRAND reconnaît qu’on pouvait avoir des doutes sur la crédibilité de certains témoins mais ce n’était pas une généralité. A la demande de l’avocat, elle précise la distance entre l’église et le local communal : « 100 mètres à tout casser ». Quelqu’un qui se tenait devant la commune pouvait évidemment tout voir ce qui se passait à l’église.
Madame Aurélie BELLIOT cherche à savoir si à Kabarondo on avait utilisé le même mode opératoire. Le témoin de répondre par l’affirmative: rassemblement dans les églises puis jet des corps dans les fosses. Le témoin est amené à préciser qu’ils avaient plus de liberté au Rwanda qu’en Belgique pour auditionner les témoins car c’est eux qui faisaient les auditions. En Belgique, c’était les Belges qui auditionnaient.
Maître BOURGEOT cherche à connaître la formation qu’avait le témoin sur l’histoire du Rwanda. Madame CLAMAGIRAND évoque ses échanges avec d’autres enquêteurs, ses lectures. Et de rappeler qu’elle n’est plus dans les dossiers rwandais depuis deux ans, qu’en tant qu’enquêtrice, elle s’intéressait au factuel. Elle est entrée dans le dossier à partir de la plainte du CPCR mais pas seulement. Surtout à partir des dossiers du GFTU. Suivra une série de questions sur les témoignages recueillis par le GFTU, sur les relations du GFTU avec le CPCR.
A l’avocate qui s’étonne que les enquêteurs aient pu recevoir l’aide d’associations de victimes, le témoin reconnaît au contraire que ces associations les ont beaucoup aidés. Quant à savoir si les témoins étaient « préparés », l’enquêtrice répond que la trame qu’ils utilisaient les aidait à se sortir des discours stéréotypés.
Maître CHOUAI veut savoir qui a élaboré la trame utilisée lors des auditions alors que le témoin n’a pas reçu de formation. Ce dernier de répondre que c’est les magistrats qui ont fait la trame. Elle a lu la plainte du CPCR et les dossiers du GFTU.
L’avocat fait remarquer que toutes les auditions se terminent pas la même question: « Accepteriez-vous de venir témoigner en France? » Et souvent la même réponse : « Oui, à condition que cela n’ait pas de conséquences pour moi et ma famille« , laissant sous-entendre que les témoins auraient peur!
« – Pourquoi est ce toujours Méthode RUBAGUMAYA qui assure la « supervision » du GFTU?
– C’est lui qui connaissait le mieux le dossier » répond le témoin.
Et de reconnaître que c’était parfois difficile avec les autorités rwandaises. Les enquêteurs avaient des relations avec l’OPJ rwandais qui les assistait dans les missions. Il leur arrivait de manger ensemble. Et maître CHOUAI de lire un échange de courriels entre monsieur GRIFFOUL, enquêteur, et Méthode, courriels qui semblent révéler une « certaine proximité » entre les deux hommes! « Il nous a assistés pour la recherche des témoins » se contente de déclarer madame CLAMAGIRAND.
Et l’avocat de NGENZI de s’étonner que dans les prisons la collecte des informations lors des Gacaca [1] soit confiée à un prisonnier. « Avez-vous eu connaissance de ces taupes? » Le témoin ne sait pas.
Pour clôturer son intervention, maître CHOUAI évoque la parution d’un livre de Philippe LANSON, Le Lambeau, qui évoque son témoignage sur l’attentat du Bataclan pour montrer que le traumatisme peut créer des troubles de la mémoire! On lui fait remarquer à juste titre que c’est un très mauvais exemple car ce monsieur a été fortement blessé lors de l’attentat et qu’il ne peut se souvenir exactement de ce qui s’est passé.
Audition de Pierre PÉAN, cité par la défense.
Le témoin commence par dire qu’il ne connaît pas le dossier traité par la Cour d’assises mais il veut tout de site déclarer que le fait que le pôle génocide participe à la « justice des vainqueurs » est une source d’injustice. Et de rappeler ses « hauts faits » en matière de littérature d’investigation. Et de révéler que s’il s’est intéressé au sujet c’est parce qu’il était proche d’un Africain qui était en relation étroite avec l’unité de missiles qui a tiré sur l’avion (NDR. Il eut été intéressant d’en savoir un peu plus sur cette révélation!)
Pour lui, l’attentat est quelque chose d’essentiel. S’il est avéré que c’est KAGAME qui a fait abattre l’avion, ce dont il est certain, il faudrait réécrire l’Histoire.
Et d’évoquer la publication de « Noires fureurs, blancs menteurs » qui lui a valu tant de malheurs (NDR. Un tissu de mensonges et de calomnies!), ainsi que les autres ouvrages ou articles qu’il a commis par la suite. Les gens qui n’étaient pas d’accord avec lui lui ont « pourri la vie »! Pire, le procès auquel il a dû faire face était porté par SOS Racisme alors qu’il était lui-même parrain de cette association. D’où la réputation de raciste, de négationniste qui lui colle à la peau. Il dénonce la violence des attaques subies : dire qu’on a osé comparer son livre à Mein Kampf! On va même jusqu’à le considérer comme un antisémite! En fait, son analyse repose sur le rapport BRUGUIERE (NDR. Complètement déconsidéré par son manque d’objectivité et démenti par celui du juge TREVIDIC qui a été nommé après lui.), et sur celui de la justice espagnole.
On l’accuse de ne pas s’être rendu au Rwanda? Il s’en félicite plutôt car on ne va pas dans une dictature. Et de commencer à s’en référer à Carla del PONTE et Louise HARBOUR qui n’ont pu mener leurs enquêtes à leur guise, surtout en ce qui concerne les crimes du FPR. La compétence universelle? « Une bonne idée, mais pas avec une dictature et une autre culture. » Lui s’en tient à la dénomination utilisée autrefois: « Le génocide des Tutsi et des Hutus modérés. » (NDR. En réalité, ce n’est pas tout à fait la bonne formule souvent utilisée autrefois: « le génocide des Tutsi et le massacre des Hutu modérés ». Ce n’était pas une bonne formulation. Mieux valait parler des « Hutu d’opposition. »)
Revenant sur les témoins, il soutient la thèse de la défense qui dit qu’il est difficile de trouver des témoins à décharge, dénonçant au passages « des témoins qui seraient pris en mains pour qu’ils disent ce que veut le Rwanda ». Et de dénoncer violemment le témoin Oreste INCIMATATA, prêtre de la paroisse de Kabarondo qu’il accuse d’avoir fait partie du DMI, les services secrets du FPR. Et de faire allusion au témoignage d’un certain Marcel GERIN qui accuse le FPR d’avoir massacré plus de 30 000 civils à Kabarondo!
Et de clôturer sa déposition par une attaque en règles du CPCR dirigé par Alain GAUTHIER, « le relai du procureur au Rwanda. » Et d’ajouter, sans scrupule: » GAUTHIER va faire ses emplettes au Rwanda, c’est lui qui maîtrise les cibles. » (NDR. Attaques mensongères et calomnieuses, aussi minables que celui qui les profère.)
Madame la présidente commence par lui rappeler que la Cour d’assises est indépendante et ne dépend pas du pôle crimes contre l’humanité. D’où lui vient d’ailleurs cette dénonciation de « la culture du mensonge« ? » C’est culturel depuis des siècles » répond le témoin. Il a lu beaucoup de spécialistes qui en parlent.
A ce stade, madame la présidente remet maître EPSTEIN à sa place en lui rappelant qu’elle pose les questions qu’elle souhaite poser.
Maître PARUELLE pose la même question. Le témoin de préciser: « Il est dangereux d’enquêter au Rwanda ». Ses travaux s’appuient sur les témoignages des exilés. Pour savoir ce qui se passait en Russie, on s’est basé sur le témoignage des dissidents. Pas besoin d’aller sur place.
Les morts de Kabarondo, à qui faut-il les attribuer? Et le témoin de confirmer ce qu’il a déjà dit. Pour lui, Kabarondo évoque trois choses: ce qu’a dit Marcel GERIN, le rapport GERSONI et les travaux du TPIR.
Maître LAVAL intervient à son tour. Il revient sur la « justice des vainqueurs » et demande au témoin s’il a à l’esprit, dans l’histoire judiciaire récente, des exemples où il a été question de la justice des vainqueurs. Le témoin s’embrouille, dénonce les crimes du FPR… L’avocat du CPCR lui cite alors les deux cas dont il veut parler: le procès de Nuremberg et le procès de Tokyo. Et d’ajouter: « Ce sont les défenseurs les plus ardents des criminels de guerre nazis et japonais qui ont utilisé cette expression! Çà vous assomme? » (NDR. Le témoin est renvoyé dans son camp, décontenancé.) Pour lui, Kigali a raconté une histoire qui ne correspond pas à la vérité.
Maître LAVAL enfonce le clou. « Le TPIR, c’est la justice des vainqueurs? la Cour d’assises de Paris, c’est la justice des vainqueurs? » PÉAN perd pieds : « J’ai dit ce que j’avais à dire. » Et de raconter son engagement auprès de Wenceslas MUNYESHYAKA! Maître LAVAL se doit de lui rappeler où en est la procédure. Quant à l’enquête sur l’attentat, l’avocat du CPCR s’étonne que le témoin parle de la procédure: » Vous avez eu accès au dossier? »
Maître ARZALIER fait remarquer que quel que soit l’auteur de l’attentat, cela ne change rien sur la culpabilité des accusés.
Maître Kévin CHARRIER, autre avocat du CPCR, rappelle au témoin les raisons pour lesquelles le mandat de Carla del PONTE n’a pas été renouvelé. C’est une décision du Conseil de sécurité qui, à l’unanimité, a voulu que l’on recentre son travail sur l’ex-Yougoslavie. Elle n’était que 30 jours par an à Arusha, une « juge à temps partiel « ! Et le CPCR? Ce serait une machine de guerre dangereuse? Combien de procès depuis 25 ans?
Au tour de maître GISAGARA d’intervenir. « Dans votre phrase, si on changeait Tutsi par Juifs, qu’est ce que ça deviendrait? » Madame la présidente le reprend, ce n’est pas le lieu de parler des Juifs. « Il ne faut pas brouiller les pistes. » Et l’avocat de rappeler que depuis janvier 2017 nier le génocide des Tutsi tombe sous le coup de la loi!
Madame BELLIOT, pour l’accusation, précise au témoin que le pôle n’est pas seulement chargé d’affaires rwandaises.
Monsieur BERNARDO, l’avocat général, demande au témoin vers quel message il veut nous amener comme témoin de la défense. PÉAN redit qu’il est difficile de travailler avec un pays qui est une dictature. Même les meilleurs spécialistes le disent. Et d’ajouter que depuis la publication du livre de Judi REVER au Canada, Filip REYNTJENS lui-même sait maintenant qu’il y a eu deux génocides. Et l’avocat général de rappeler qu’on est là pour juger deux hommes et que dans la mesure où l’affaire de l’attentat n’est pas terminée, on ne peut rien en dire.
Maître CHOUAI pour la défense a deux remarques à faire à l’accusation: il est choqué que l’avocat général ait parlé de « présumés responsables » en parlant des accusés, il n’y a que des « présumés innocents »! Quant à parler des élections dans les pays africains qui seraient des « élections de maréchal », « c’est du racisme ordinaire ». Monsieur BERNARDO demande à l’avocat de bien vouloir retirer immédiatement ses propos!
L’avocat de NGENZI de revenir sur les plaintes de la justice espagnole qui a inculpé James KABAREBE, actuel ministre de la défense. La présidente rappelle qu’en Espagne on bénéficie aussi de la présomption d’innocence!
Maître EPSTEIN demande au témoin comment il fait ses enquêtes. Ce dernier confie qu’il travaille longtemps, qu’il cherche des documents et que son système est basé sur le temps. Il y a consacré quatre ans de sa vie. Et le témoin de confirmer que la défense bénéficie de beaucoup moins de moyens que l’accusation. Il s’inscrit en faux contre les accusations contre la France à Bisesero en particulier. Il finit par se demander s’il a bien fait de s’intéresser au sujet. « Il y avait trop de coups à prendre ». (NDR. IL oublie de parler de tous les coups qu’il a donnés lui-même!)
Interrogé sur le film « Tuez-les tous« , le témoin l’a vu mais il faudrait qu’il le revoie. Il s’est toujours dit en total désaccord avec leurs auteurs. Il préfèrerait que la Cour visionne le film de la BBC: « An untold story« .
La journée se termine par l’étude des conclusions de la défense qui demande un transport sur les lieux. La Cour rendra son avis dans les jours à venir.
Alain GAUTHIER
- Gacaca : (se prononce « gatchatcha »)
Tribunaux traditionnels au Rwanda, réactivés en 2001 et opérationnelles à partir de 2005, en raison de la saturation des institutions judiciaires pour juger des personnes suspectées de meurtre pendant le génocide. Composées de personnes élues pour leur bonne réputation, les Gacaca avaient une vocation judiciaire et réconciliatrice, favorisant le plaider coupable en contrepartie de réduction de peines. Près de 2 millions de dossiers ont été examinés par 12000 tribunaux gacaca avant leur clôture officielle le 18 juin 2012.
Cf. glossaire.
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