Procès de Laurent BUCYIBARUTA du mardi 28 juin 2022. J 33


Audition de monsieur Juvénal RUTEBUKA, cité par la défense, en visioconférence du Rwanda. Ancien secrétaire de la commune de NYAMAGABE.

  • Déclaration spontanée.

Le témoin : Ce que je dirai à la Cour, c’est que je connais Laurent BUCYIBARUTA, mais que nous n’avons pas travaillé ensemble.

Président : Est-ce que vous pouvez nous expliquer quel a été votre parcours ? Avez-vous été secrétaire de la commune de NYAMAGABE ?

Le témoin : Oui, j’ai exercé cette fonction, de 1970 à 1974 après avoir été instituteur à KIBILIZI, dans la préfecture de GIKONGORO.

Président : Qu’avez-vous fait après avoir été secrétaire de la commune de NYAMAGABE ?

Le témoin : De 1975 à 1988, j’étais conseiller de secteur dans ce qui était à l’époque la commune de NYAMAGABE.

Président : Est-ce que vous exercez des activités professionnelles ou représentatives en avril 1994 ? Quelle était votre activité en avril 1994 ?

Le témoin : Rien, je n’exerçais aucune activité, j’étais paysan.

Président : Connaissiez-vous à l’époque les élus locaux, que ce soit le bourgmestre, le représentant de l’Etat, les préfets ou les sous-préfets ?

Le témoin : J’ai travaillé avec les bourgmestres. J’ai été limogé.

Président : Pourquoi avez-vous été limogé ?

Le témoin : Plusieurs litiges nous opposaient. D’abord, ils nommaient des agents dans l’irrespect de la législation en la matière. Ils licenciaient les agents sans respecter aucune réglementation. Quand tu les contestais, tu en subissais les conséquences. Ainsi, ils m’ont rayé de la liste et ils m’ont trahi aussi auprès du MRND[1].

Président : Néanmoins, vous avez continué à exercer des fonctions de conseiller de secteur, avez-vous fait partie d’un parti politique ?

Le témoin : Depuis 1998, je n’ai plus exercé les activités de conseiller. J’ai tout simplement regagné mon domicile pour travailler dans l’agriculture.

Président : Que pouvez-vous dire de Laurent BUCYIBARUTA ?

Le témoin : Je ne sais pas exactement quand Laurent BUCYIBARUTA a été nommé à la tête de GIKONGORO. J’ai quitté mes fonctions en 1988, je n’ai jamais travaillé avec lui.

Président :  Avez-vous eu l’occasion de le rencontrer ?

Le témoin : Oui, je l’ai rencontré.

Président :  En quelle circonstance ? Que pouvez-vous nous dire à ce sujet ?

Le témoin : J’étais citoyen ordinaire et lui préfet à GIKONGORO. En 1996 ou 1997, il y a eu une réunion dans la ville de GIKONGORO. Il y avait la population de KIGALI, GITARAMA, BUTARE et de GIKONGORO. La réunion a eu lieu dans la ville de GIKONGORO, des allocutions y furent prononcées. La réunion était dirigée par SIMBA[2] puis par RUTAMARUTOKI. Ils ont dit qu’il fallait cotiser de l’argent en vue d’aller chasser les Inkotanyi[3] de NYANZA. L’argent fut collecté. Je vais vous dire toute la vérité de manière absolue. Il y a eu quelqu’un, un Interahamwe[4], qui avait un surnom qui m’échappe. Il lui a dit « Toi, tu es un complice des Inkotanyi ». L’autre n’a rien répondu. La réunion a eu lieu, elle a pris fin et il y avait beaucoup de gens venus de ces préfectures-là.

Président : Vous dites que ça se serait passé en 1996 ou 1997, est-ce que ça ne se serait pas plutôt passé en 1994 ?

Le témoin : Non, ce n’est pas en 1994, les Français étaient là[5].

Président :  Les Français étaient là en 1994? La date serait plus logique.

(Aucune réponse du témoin). 

Président : Vous vous souvenez que la réunion a eu lieu alors que les Français de la force Turquoise étaient présents ?

Le témoin : Pour ce qui concerne les Français, ce que j’aurais à dire à leur égard, j’avais chez moi des Tutsi, plus de sept, nous les avons fait parvenir auprès des français qui se trouvaient à TABA Jusqu’à présent, ces personnes sont encore en vie.

Président :  Pour revenir à la réunion dont vous avez fait état, est-ce qu’elle se situait sur la place d’un marché ?

Le témoin : Oui.

Président : Est-ce que la personne qui s’est adressée à Laurent BUCYIBARUTA c’était BIHEHE ?

Le témoin : Oui, c’était BIHEHE. Il avait même un fusil.

Président : En dehors de prononcer cette phrase à Laurent BUCYIBARUTA : « Toi, tu es un complice des Inkotanyi » : est-ce qu’il l’a menacé ?

Le témoin : BIHEHE n’a rien fait contre lui. Il avait même un fusil. Quand il lui a tenu ces propos, je l’entendais de mes propres oreilles. Les gens de toutes ces préfectures-là s’étaient rassemblés et les gens qui étaient présents vous diraient la même chose.

Président :  Est-ce que vous connaissez le colonel SIMBA ?

Le témoin : Le colonel SIMBA est celui qui distribuait les fusils, et c’est lui qui accordait la parole aux intervenants.

Président : Est-ce que le nom de SEMAKWAVU vous dit quelque chose ?

Le témoin : Il était bourgmestre.

Président : Est-ce qu’il était présent à cette réunion?

Le témoin : Il était présent.

Président :  Que pouvez-vous nous dire sur SEMAKWAVU ? Comment se comportait-il pendant la période du génocide ?

Le témoin : SEMAKWAVU était bourgmestre, mais ce n’était pas du temps où je travaillais là-bas. Mais, tel que je le voyais, il collaborait avec SIMBA.

Président :  Est-ce que vous diriez également que le préfet Laurent BUCYIBARUTA collaborait avec SIMBA ?

Le témoin : Aucune idée, là-dessus, ça c’est des choses qui étaient de l’apanage des dirigeants.

Président : Comment le préfet a réagi aux propos tenus par BIHEHE ?

Le témoin : Je ne l’ai pas entendu dire quoi que ce soit. C’était une ignominie.

Président : Ce qui avait été dit était perçu par tout le monde comme une ignominie ?

Le témoin : Correct.

Président : Souhaitez-vous dire autre chose ?

Le témoin : Je n’ai rien d’autre à ajouter. Mais, voyez-vous, quelqu’un qui tient de tels propos à une autorité de manière irrespectueuse, et ce publiquement, ça dépassait l’entendement.

Président : Quand vous avez été entendu par les enquêteurs français, vous avez dit à propos du préfet : « Il était considéré comme un complice car il avait une femme Tutsi ».  Vous en souvenez-vous ?

Le témoin : Cela, je l’ai dit. Mais, par après, j’ai entendu beaucoup d’autres choses, j’ai entendu beaucoup d’autres choses affligeantes concernant les massacres de MURAMBI, de CYANIKA, de KADUHA mais, ce sont des choses qui parvenaient à mes oreilles, je n’ai pas d’informations précises là-dessus.

Président :  Ces choses affligeantes impliquaient le préfet Laurent BUCYIBARUTA ?

Le témoin : Je n’en sais rien, vraiment je n’ai pas d’information à ce sujet. Les gens disent qu’il était là, mais moi je n’en sais rien.

Président : Est-ce que ce que vous voulez dire c’est que Laurent BUCYIBARUTA était présent au moment des massacres ?

Le témoin : C’est ce que j’entends dire.

Président :  Mais c’était des rumeurs ? Vous n’en savez rien en fait ?

Le témoin : Laurent BUCYIBARUTA, je ne le connais pas. Même si nous nous rencontrions, il ne me reconnaitrait pas. Il ne connait même pas mon nom.

Président : Vous même, Monsieur, vous êtes Hutu ou Tutsi ?

Le témoin : Je suis vraiment Hutu.

Président : Quand vous avez été entendu, vous avez indiqué avoir perdu des beaux-frères pendant le génocide ?

Le témoin : Je ne sais pas quoi dire sur leur mort, à part que c’était mes beaux-frères.

Président : Étaient-il Hutu ou Tutsi ? Où ont-ils été tué ? Pourquoi ?

Le témoin : Je vous ai dit que je cachais beaucoup de gens chez moi, et parmi ces gens un beau-frère à moi. Alors, les personnes concernées étaient dans une chambre, mon beau-frère m’a dit qu’il ne pouvait pas rester tout le temps dans la maison car les Interahamwe pouvaient le trouver et le tuer. Il m’a dit qu’il allait passé la journée sous un pont pour rentrer à la maison la nuit, c’est ainsi qu’il est parti pour se rendre sous un pont, les Interahamwe l’ont trouvé et l’ont tué.

Président : Souvenez-vous à quelle date ça se passe ? Au moment de la réunion dans laquelle Monsieur Laurent BUCYIBARUTA a été interpellé ? Avant ? Après ?

Le témoin : La réunion à laquelle se trouvait Laurent BUCYIBARUTA et à laquelle j’étais présent, personne n’a été tué.

Président : Ce n’est pas ma question. Je comprends qu’il n’a pas été tué au moment de la réunion, mais quand a-t-il été tué ? Avant ou après la réunion ?

Le témoin : La réunion à eu lieu après la mort de mon beau-frère. Lors de cette réunion, les Français ont dit qu’il fallait débroussailler.

Président : Je ne comprends pas trop, vous dites que les Français faisaient la chasse au Tutsi ?

Le témoin : C’est plutôt au Français que nous remettions les gens que nous avions cachés chez nous.

Président : Souhaitez-vous ajouter quelque chose Monsieur ?

Le témoin : Quiconque a commis ou planifié le génocide doit perte puni de manière exemplaire.

 

PAS DE QUESTION DE LA COUR.

PAS DE QUESTION DES PARTIES CIVILES.

PAS DE QUESTION DU MINISTÈRE PUBLIC.

 

QUESTIONS DE LA DÉFENSE :

Me BIJU-DUVAL : Lorsque vous avez été entendu par les enquêteurs français, à la fin de votre déposition, l’enquêteur vous demande si vous souhaitez ajouter quelque chose et vous dites la phrase suivante : « Selon moi, ce sont des raisons politiques pour lesquelles on enquête sur Laurent BUCYIBARUTA, car pour moi il n’a rien fait ». Quand vous dites cela, que voulez-vous dire ? Sur quoi vous appuyez-vous pour dire qu’il n’est pas impliqué dans le génocide ?

Le témoin : Moi, j’ai dit que nous n’avions pas travaillé avec Laurent BUCYIBARUTA. Nous n’avons pas travaillé ensemble. Ce que j’ai dit, je l’ai dit et je l’ai répété, et je vous ai dit qu’avant ça j’ai entendu dire qu’on parlait de lui à CYANIKA, MURAMBI, KADUHA, mais moi je n’étais pas là. Est-ce que j’ai nié qu’il n’a pas fait le génocide ? Je n’ai jamais nié, j’ai dit ce que j’ai vu.

Me BIJU-DUVAL : Ces rumeurs concernant CYANIKA, MURAMBI, KADUHA, vous avez entendu ces informations après le génocide ?

Le témoin : J’ai eu ces informations après le génocide. Ce ne sont pas des choses que j’ai vues moi-même.

Me BIJU-DUVAL : Vous avez été entendu par les enquêteurs français en 2013 et à ce moment-là vous dites aux enquêteurs : « Pour moi, il n’a rien fait ». Est-ce qu’on peut en conclure que les informations dont vous nous parlez maintenant, les rumeurs à CYANIKA, MURAMBI, KADUHA : est-ce que vous les avez obtenues, en avez-vous eu connaissance après votre audition avec les enquêteurs ?

Le témoin : Oui, j’ai entendu cela après.

Me BIJU-DUVAL : Merci Monsieur, je n’ai pas d’autre question.

 

Audition de madame Immaculée MUKAMANA, partie civile citée par la CRF[6].

Le témoin a été entendu le 24 mai mais son audition n’a pu être menée à son terme, faute de temps. Elle revient aujourd’hui en visioconférence comme cela lui avait été proposé. Elle reprend son témoignage là où elle l’avait laissé, sur l’invitation de monsieur le président

Je dirai tout simplement que le génocide avait été planifié depuis bien avant. Comme je vous l’avais dit, ma famille avait été persécutée bien avant 1994. Je vous avais dit que plusieurs fois nous passions les nuits dans les brousses en fuyant. En 1994, c’était la réalisation et la concrétisation d’un plan qui avait été préparé, et c’est tout cela qui a provoqué des conséquences jusqu’à aujourd’hui.

Président : Est-ce que j’ai bien compris si je dis que votre fratrie était composée de quatorze enfants ?

Le témoin : C’est exact.

Président : Pouvez-vous préciser l’endroit exact où vous habitiez à GIKONGORO ? Pouvez-vous nous  préciser où était votre maison ?

Le témoin : Nous habitions dans la ville de NYAMAGABE. C’était exactement dans le quartier commercial étant donné que mon père était commerçant. Le quartier commercial dans le temps se trouvait à NZEGA. Mon père habitait quant à lui dans le nouveau quartier commercial dans la ville même de GIKONGORO. Pendant le génocide, notre maison de NZEGA a été détruite. Nous avions deux maisons et celle où nous habitions a été détruite, et celle avec les locataires a été détruite. L’habitation de mon frère a aussi été détruite, et il en fut de même de son lieu de commerce, tout comme les maisons qu’il louait à des expatriés. Ceux-ci ont été mis dehors et les maisons furent détruites. En réalité, toutes les maisons furent détruites. Notre maison de campagne et tous les biens que nous avions dans nos localités d’origine ont été détruits. En ce qui concerne les bovins, nous avions chez nous une vache de race moderne, on l’a donnée en guise de rétribution à quelqu’un qui avait tué plus que les autres. A la fin du génocide, nous n’avions plus rien et nous avions dû nous reconstruire par après. La voiture de mon frère servait au transport des tueurs, ces tueurs l’avaient pillée et ils circulaient partout avec. Ils se sont rendus au Congo, en exil, avec le véhicule.

Président : Est-ce qu’à l’occasion d’une attaque de l’une de vos maisons, et plus précisément celle près d’un rond point, est-ce que vous vous souvenez d’un épisode se violence ?

Le témoin : Ce dont je me rappelle, c’est que les gens qui sont allés piller le magasin de mon frère se sont disputés entre eux, on a tiré sur quelqu’un.

Président : Monsieur Laurent BUCYIBARUTA, il me semble que vous avez évoqué avoir conduit des personnes qui étaient blessées à l’hôpital de KIGEME, à la suite d’une attaque contre une maison, c’est bien ça ?

Laurent BUCYIBARUTA : Oui, c’est exact.

Président : Est-ce qu’il s’agissait bien du frère de madame ?

Laurent BUCYIBARUTA : Non, le président se trompe de témoin. Je ne connais ni le témoin, ni sa famille.

Président : Au temps pour moi. Connaissez-vous la famille de la partie civile ?

Laurent BUCYIBARUTA : Non.

Président : Connaissiez-vous le préfet ? Aviez-vous des liens avec sa famille ?

Le témoin : Il n’y avait aucun lien entre nous. Mais, je pense qu’il devait connaitre mon frère car c’était un commerçant connu dans la ville de NYAMAGABE. Surtout qu’ils avaient établi une liste après la mort de BUCYANA, et sur cette liste mon frère figurait en numéro 1.

Président : Est-ce que BUCYANA était le président de la CDR[7] ?

Le témoin : Il était président de la CDR. A sa mort, il a été prévu de tuer les Tutsi qui se trouvaient dans la commune de NYAMAGABE. Ce jour-là, ils avaient établi et rendu public une liste avec moi y compris. Nous n’avions pas passé la nuit à la maison et nous avions fui.

Président : Il va y avoir la mort de BUCYANA et le président du MDR[8] qui était GAPYISI. À la suite de ces assassinats qui vont susciter des troubles importants dans le pays, souvenez-vous de ce qui se passe exactement à GIKONGORO? Souvenez-vous d’un sous-préfet qui a essayé d’intervenir et de faire des choses au niveau du préfet ?

Le témoin : Je n’ai pas d’informations a ce sujet. Ce que je sais c’est que RUSATSI a lui même été tué pendant le génocide.

Président : Savez-vous où il a été tué ?

Le témoin : Je ne le sais pas avec précision.

Président : S’agissant de cette liste rendu public, c’était combien de temps avant le génocide ?

Le témoin : Je ne m’en rappelle pas bien, mais peu avant le génocide. Ça doit être en 1993, toujours est-il que c’était juste avant la mort de BUCYANA. (NDR. BUCYANA a été tué fin février 1994, en représailles de la mort de monsieur Félicien GATABAZI. Tué à MBAZI, près de BUTARE.)

Président : Comment cette liste avait-elle été connue ?

Le témoin : Cette liste qui était sur des papiers non signés était distribuée par des gens qui se les passaient entre eux. C’est surtout suite à cette liste que beaucoup de gens ont dû fuir, s’étant rendu compte qu’ils risquaient d’être tués. De ma cachette, j’ai personnellement vu cette liste.

Président : Concrètement, savez-vous s’il y a eu une enquête pour déterminer qui étaient les auteurs de cette liste ? De simples rumeurs ? Un projet criminel à travers ça ?

Le témoin : Je ne pouvais pas donner de précisions à ce sujet, mais tout ce que je sais c’est que toutes les personnes qui figuraient sur cette liste ont été tuées et ceci était d’autorité publique. Depuis l’annonce de cette liste, quiconque y figurait n’a plus jamais passé la nuit chez lui.

Président : Savez-vous qui était en charge du Parquet ? De la gendarmerie ? De la justice ? Était-il possible de s’adresser à des autorités ?

Le témoin : En ce qui concerne les dirigeants de la gendarmerie, parmi eux je connaissais un certain SEBUHURA et un certain HABAYISENGA, aujourd’hui incarcéré pour cause de génocide. Il fait partie de ceux qui ont pillé les biens de mon grand-frère. Il a dû répondre de cela devant les juridictions Gacaca[9]. Il figure parmi ceux qui ont été condamnés à la réparation des biens endommagés.

Président : On a compris que vous vous occupiez d’un enfant de votre frère, est-ce que vous-même, vous avez des enfants ? Trois enfants il me semble ?

Le témoin : Oui.

Président : Donc, vous avez expliqué que ça a été très compliqué pour votre neveu, comment vos enfants et le neveu que vous avez adopté évoluent ?

Le témoin : J’ai légalement adopté ce neveu. Il vit avec mes enfants. J’ai payé pour lui les frais de scolarité et il a terminé ses études secondaires. Il a poursuivi et terminé ses études en Angleterre. Actuellement, il est rentré au Rwanda, c’est un jeune homme, il travaille avec moi et m’aide dans mes activités commerciales. Moi aussi, je suis une commerçante. A l’heure actuelle, il se trouve en France. Il est rentré d’un voyage de travail en Italie, et il est passé par la France. Il a grandi et est devenu un homme et il s’entend bien avec mes enfants. Seulement, comme il a grandi, c’est surtout pendant la période de commémoration qu’on voit qu’il réfléchit beaucoup à ce qui s’est passé. Il commence à se rendre aux endroits où ses parents ont été éliminés. Lorsqu’il apprend que quelqu’un a retrouvé les siens, il se demande s’il ne se pourrait pas qu’un jour il revoie un membre de sa propre fratrie. On voit qu’il n’a pas encore bien intégré le fait qu’il ne retrouvera plus un membre de sa fratrie.

QUESTIONS DE LA COUR.

JA1 : Je reviens sur la question qui vous a été posée par le Président, pour savoir si on pouvait s’adresser au Parquet, à la gendarmerie et à la justice, vous avez cité deux noms :  le capitaine SEBUHURA et celui dont je n’ai pas le nom qui a été condamné pour avoir pillé les biens de votre frère. La question était plutôt : pouvait-on s’adresser aux autorités pendant le génocide pour qu’ils fassent leur travail normal de faire respecter la loi, l’ordre public pour protéger les victimes ?

Interruption de Me GISAGARA qui intervient pour dire que la question du président portait sur la situation avant le génocide. Le président dit toutefois que la question est pertinente: avant ou pendant.

Président : Quelles étaient les autorités auxquelles on pouvait s’adresser que ce soit dans la période du génocide ou avant le génocide ?

Le témoin : Un Tutsi n’avait jamais de possibilité de recours, que ça soit avant ou après le génocide. Il n’y avait aucune autorité à qui il pouvait se confier. Ils étaient persécutés et menacés pendant que les autorités le voyaient.

QUESTIONS DES PARTIES CIVILES.

Me GISAGARA : Je n’ai pas de question, mais juste remercier ma cliente pour évoquer ce passé douloureux. J’aimerais juste poser une question à Monsieur Laurent BUCYIBARUTA, car il a dit qu’il ne connait pas la famille de Madame la témoin, mais j’aimerais juste qu’il me confirme qu’il ne connait pas Emile KAREKEZI qui était un grand commerçant de GIKONGORO ?

Laurent BUCYIBARUTA : A GIKONGORO, il y avait beaucoup de commerçants. Certains je les connaissais de vue. Il est possible que j’ai croisé le frère du témoin mais je ne peux pas dire que je connaissais son nom car il y a beaucoup de gens dont je connaissais le visage car moi aussi, je me rendais dans les magasins pour les approvisionnements. Je ne connaissais pas le nom de tous les commerçants.

Sur question d’un avocat des parties civiles concernant les conséquences de la mort de BUCYANA à GIKONGORO, Le témoin s’explique. Là où on peut voir un lien, c’est par exemple quand il y a eu la mort du président HABYARIMANA, on a accusé les Tutsi. Quand HABYARIMANA est mort, le lendemain, à GIKONGORO, on a commencé à tuer des personnes. Ces personnes ont été tuées alors que HABYARIMANA était mort à KIGALI. Ça s’entend bien, ça se comprend. Le Tutsi était menacé. À GIKONGORO, comme je vous l’avais déjà dit, c’est là où les tueries avaient commencé aussi. Tout ce qui se passait en 1994, on s’en prenait aux Tutsi directement.

L’avocat : Vous avez également parlé de ce plan en 1994. Depuis que vous avez connaissance des persécutions des Tutsi à GIKONGORO, pouvez-vous expliquer de quelle manière les autorités administratives, à commencer par les responsables des cellules, les conseillers de secteurs, les préfets et les autres autorités comme la gendarmerie, étaient impliquées dans cette organisation ? Que faisaient-ils ?

Le témoin : Il n’y a pas un citoyen qui peut s’en prendre et tuer un autre voisin, alors qu’il y a les autorités. Comme nous le savons, les autorités sont mises en place pour assurer la sécurité de la population. Les autorités ne faisaient rien pour rendre justice à ceux qui étaient menacés. Tous ceux qui ont été tués, les autorités aussi le voyaient.

QUESTIONS DE LA DÉFENSE :

Me BIJU-DUVAL : Je voudrais revenir sur les troubles fin février qui font suite à l’assassinat du président de la CDR, et du ministre GATABAZI. Je voudrais vous demander si vous avez eu l’occasion d’entendre une émission diffusée par Radio RWANDA en date du 28 février 1994, dont je vais vous lire un extrait (D9119-9120), extrait parlant de mesures prises, des réunions organisées par le préfet Laurent BUCYIBARUTA à la suite de ces troubles, et en particulier de la distribution de tracts ?

C’est le journaliste, Emmanuel NSABIMANA qui parle: « Hier, suite à des tracts à caractère raciste, le préfet Laurent BUCYIBARUTA a tenu une réunion de sécurité à base élargie. Il a d’abord abordé la chronologie des événements à GIKONGORO et évoqué la manifestation  du PSD[10] du 22 février suite à la mort de GATABAZI. Ces tracts visaient certains Tutsi. Laurent BUCYIBARUTA a exprimé ses inquiétudes et appelé les fonctionnaires de GIKONGORO à la vérité, à l’unité des gens indépendamment de leur origine régionale ou ethnique. »

Vous avez entendu cela?

Le témoin : Je n’ai pas d’informations sur cette réunion qui a eu lieu. Ce que je sais depuis le début, c’est que les Tutsi étaient mal vus. Je n’ai pas eu connaissance de cette réunion. Les Tutsi qui étaient à GIKONGORO et NYAMAGABE se faisaient fouiller tout le temps. Je n’ai pas eu connaissance de cette réunion dont vous parlez. Depuis ce jour-là, les Tutsi étaient menacés et ne passaient pas la nuit chez eux. Je le confirme aussi car, moi-même, je vivais cette situation et mon frère aussi. Par exemple, mon frère qui travaillait à NYAMAGABE fuyait avec les enfants, allaient passer la nuit à BUTARE et revenait le lendemain. D’autres Tutsi aussi fuyaient et se cachaient tout le temps, tout le temps.

Me BIJU-DUVAL : Radio Rwanda époque la préoccupation de Laurent BUCYIBARUTA concernant la distribution de tracts, visant certains Tutsi : qu’en pensez-vous ? Que pensez-vous de cette réaction de Laurent BUCYIBARUTA qui convoque une réaction des chefs de service concernant la sécurité ?

Le témoin : Quel était l’objet de cette réunion ?

Président : Nous avons un compte rendu officiel. Je vais donner lecture car je pense que la lecture n’était pas partielle.

(Le Président cite les noms des personnes présentes à cette réunion). Monsieur le président parle d’une émission du 23 février. Il y a une confusion. On a du mal à y voir clair. Monsieur BIJU-DUVAL maintient qu’il ne s’agit pas de la même émission.

On s’en tiendra là.

A la fin de l »audience, il est questions de pièces que le CPCR veut verser au dossier. Il s’agit de transcription d’écoutes téléphoniques prises dans un autre dossier et dont les propos ont été traduits en français par un interprète assermenté. La défense conteste la déposition de telles pièces. Elle veut avoir la transcription des écoutes en Kinyarwanda pour s’assurer de la traduction. Affaire à suivre.

 

 

Audition de monsieur Jonas KANYARUTOKI, cité à la demande de monsieur Jean-Damascène BIZIMANA, partie civile que l’on doit entendre jeudi 30 juin à 14 heures[11].

 

Président : Souhaitez-vous faire des déclarations spontanées ?

Le témoin : Ce que j’aurais à dire à la Cour, c’est que toutes les instances dirigeantes en 1994 devraient demander pardon à Dieu. Ces autorités devraient également présenter leur pardon au peuple Rwandais à cause des crimes que ces instances ont commis à une seule catégorie du peuple Rwandais.

Président : Avez-vous des choses à dire concernant Laurent BUCYIBARUTA ?

Le témoin : Ce que j’aurais à dire sur lui, c’est au sujet d’une réunion qui a eu lieu au CIPEP[12], à une date que j’oublie. Dans cette réunion, il y avait le capitaine SEBUHURA[13], tous les bourgmestres, des leaders d’opinion, ainsi que des commerçants. Ce que j’aurais à dire c’est que les paroles qui ont été prononcées ce jour-là par SEBUHURA, Laurent BUCYIBARUTA, qui était préfet à la préfecture de GIKONGORO, ne les a pas contredites. Ainsi, je demande à Laurent BUCYIBARUTA de se repentir et de demander pardon à Dieu et de demander pardon aux Rwandais, à cause des crimes que les Rwandais ont subi.

Président : Pouvez-vous être plus précis ? Qu’a dit le capitaine SEBUHURA? Où était cette réunion ? Pourquoi étiez-vous présent ?

Le témoin : Le capitaine SEBUHURA a dit explicitement que nous devions nous protéger et nous débarrasser de l’ennemi. Tous les dirigeants qui étaient présents, y compris ce préfet, ont applaudi, acclamant le discours de SEBUHURA. Pour ce qui me concerne, j’avais été invité en ma qualité de leader d’opinion.

Président : C’est-à-dire ?

Le témoin : Un leader d’opinion c’est quelqu’un qu’on ne contredit pas, qui dit la vérité, et c’est quelqu’un qui est apprécié par la population.

Président : Si on peut en savoir un peu plus sur la réunion ? Où s’est-elle tenue ? A quelle date ?

Le témoin : Je ne me rappelle pas de la date, mais la réunion s’est tenue à SUMBA au CIPEP.

Président : Quand vous dites SUMBA, vous dites dans la rue ? Dans un bâtiment ?

Le témoin : C’était dans une grande salle.

Président : Vous savez à quoi correspondait cette salle ?

Le témoin : Je ne le sais pas. C’est en contre haut de l’endroit où travaillent les chinois. Même aujourd’hui, lorsque les autorités organisent une réunion, c’est au même endroit qu’elle se tient. C’est une salle préfectorale, ce bâtiment appartenait à la préfecture.

Président : Est-ce que ça correspond à ce qu’on appelle le CIPEP ? (NDR. C’est ainsi que le témoin venait de nommer la salle.)

Le témoin : C’est là-bas, on le nomme ainsi.

Président : Je ne comprends pas trop pourquoi vous étiez là Monsieur ? Car vous n’habitiez pas là, vous habitiez dans la forêt ?

Le témoin : Nous avons été transportés par un véhicule venant de la commune de MUKO.

Président : Donc, vous venez de la commune de MUKO ?

Le témoin : Oui, notre commune est MUKO, un endroit où il y a la forêt.

Président : C’est un endroit où il y a une plantation de thé ?

Le témoin : Oui, c’est là-bas où il y a des plantations de thé. Il y a aussi une usine.

Président : Connaissiez-vous Monsieur Aloys SIMBA[2] ?

Le témoin : Je le connais, il était colonel à l’époque.

Président : Est-ce qu’il était présent à cette réunion à laquelle vous avez assisté ?

Le témoin : SIMBA était présent, mais ce n’est pas lui qui dirigeait la réunion.

Président : Qui dirigeait cette réunion ?

Le témoin : Le préfet présidait la réunion, mais la personne qui parlait c’était SEBUHURA. On voyait qu’ils se liguaient tous car quand ils parlaient, les autres applaudissaient.

Président : A cette période, il y avait des massacres ? Des gens avaient été tués ?

Le témoin : Les citoyens n’avaient pas encore commencé à tuer d’autres citoyens. Par contre, le bourgmestre de la commune de MUKO (Albert KAYIHURA) a tué le comptable, ainsi qu’un assistant. Ils les ont tué par balles le 7 avril, au lendemain de la mort de HABYARIMANA qui était survenu le 6 avril.

Président : Vous étiez-là quand on a tué ce comptable ?

Le témoin : Je n’étais pas présent lorsqu’on l’a tué, mais c’était un jour du marché.

Président : Pourquoi avez-vous été condamné ? Avez-vous tué quelqu’un ?

Le témoin : Personnellement, je prenais part aux attaques, même si je n’ai tué personne, je partais pour tuer.

Président : Avez-vous été condamné pour avoir tuer quelqu’un ?

Le témoin : J’ai été condamné alors que j’avais demandé pardon pour avoir participé aux attaques qui avaient pour but de massacrer des gens.

Président : D’accord, mais où ?

Le témoin : A GATARE, là-bas à Crête Congo-Nil. Nous quittions GIKONGORO pour aller à la réunion, transporté par le véhicule de sécurité. La commune c’est MUSEBEYA.

Président :  Quel était le nom du bourgmestre ?

Le témoin : Viateur HIGIRO. Il les a livrés et les a transportés à bord d’une ambulance et les a déposés quelque part , et c’est là que nous les avons abattus.

Président :  Je crois que Viateur HIGIRO est décédé ?

Le témoin : Aujourd’hui, oui. Mais, c’est moi qui ait témoigné à sa charge pour qu’il soit condamné. Alors que j’étais en prison, on m’a conduit sur place et j’ai dit que c’était HIGORO, et toute la population a confirmé que c’était lui qui les avait livrés à nous. Il avait été condamné à une peine de réclusion à perpétuité.

(Le Président précise que Viateur HIGIRO est décédé, et qu’il était prévu que nous l’entendions en tant que témoin).

Président :  Qui vous avait emmené à cette réunion de GIKONGORO ?

Le témoin : Nous sommes allés à GIKONGORO dans des véhicules de la commune et avec ceux de la coopérative COSAMU.

Président :  Donc, avec des véhicules de la commune de MUSEBEYA  ou de GATARE ?

Le témoin : De MUKO, ceux de MUSEBEYA étaient partis avec des véhicules de MUSEBEYA de leur côté.

Président :  Comment s’appelait le bourgmestre de la commune de MUKO ?

Le témoin : Albert KAYIHURA, aujourd’hui décédé au Congo.

Président :  Avez-vous eu l’occasion de rencontrer Laurent BUCYIBARUTA ? C’est la première fois ?

Le témoin : Je n’ai plus revu Laurent BUCYIBARUTA. Par contre, j’avais des amis qui ont péri à MURAMBI et j’ai eu à me rendre à MURAMBI. Donc, je suis allé voir mes amis à MURAMB,I et ils disaient que Laurent BUCYIBARUTA avait fait que leur famille soit tuée, lui et le capitaine SEBUHURA. Ils avaient été à l’origine du fait que les membres de leur famille avaient été tués, fusillés à cet endroit-là.

Président :  « Cet endroit-là » : vous parlez de MURAMBI ?

Le témoin : Murambi et NYAMAGABE, c’est-à-dire à GIKONGORO.

Président :  Vous, Monsieur, qui participez à des attaques en tant que Hutu contre les Tutsi, vous allez voir des amis Tutsi à MURAMBI ?

Le témoin : J’avais eu des rapports sexuels avec une fille là-bas. Elle avait même conçu de mes œuvres un enfant de sexe masculin.

Président :  Elle était Tutsi ?

Le témoin : Oui. Quand je suis arrivée là-bas, les gens disaient que les victimes avaient été tuées à cause du préfet Laurent BUCYIBARUTA et du capitaine SEBUHURA.

Président : Vous avez assisté à une réunion au début du génocide, dans laquelle on dit : « On devait se débarrasser de l’ennemi ». Donc,  on doit se débarrasser de qui ? Des Tutsi ?

Le témoin : Oui, l’ennemi c’était le Tutsi, car le FPR[14] avait gagné du terrain.

Président :  Vous dites que l’ennemi c’est le Tutsi mais vous même vous avez une amie Tutsi. Et, vous ne lui avez pas dit qu’elle était en danger ?

Le témoin : Je ne pouvais rien faire, rien du tout, alors que c’était l’autorité qui soutenait cela.

Président : Peut être que la première chose à faire c’est de ne pas aller à cette réunion et de ne pas participer à ces massacres ?

Le témoin : Monsieur le Président, si une autorité vous dit d’aller tuer chez un tel, vous ne pouvez pas ne pas y aller, c’était pour sauver votre vie.

Président :  Si je comprends bien, vous avez participé à des attaques contre les Tutsi car vous y étiez contraint ?

Le témoin : J’y ai été tout comme beaucoup d’autres citoyens par contrainte, suite à cette réunion.

Président :  Donc, si je comprends bien, tous ceux qui ont tué c’était « par contrainte » et à cause des autorités ?

Le témoin : Oui, les autorités, car avant aucun citoyen n’avait participé à des tueries, c’était plutôt les gendarmes et le bourgmestre. Laurent BUCYIBARUTA n’a rien dit par rapport à cela.

Président :  Souhaitez-vous ajouter autre chose Monsieur ?

Le témoin : Ce que j’ajouterai, c’est que dans votre sagesse et guidé par Dieu vous ferez que ces gens soient punis, après qu’ils aient demandé pardon à Dieu.

Président :  Quelle était votre activité professionnelle en 1994 ?

Le témoin : J’étais garde forestier avant 1994.

Président :  Vous aviez une amie à GIKONGORO ?

Le témoin : Vous voyez, on appelait ça maitresse et j’y allais comme ça, lors de réunions.

Président :  Faisiez-vous partie d’un parti politique ?

Le témoin : J’étais membre du mouvement qui a exterminé.

Président :  Responsable des Interahamwe[15] ?

Le témoin : Il y avait ce parti là et aussi MDR/MRND[16], mais eux aussi, c’était des Interahamwe.

Président :  Quelle tendance ?

Le témoin : En 1994, après que les autorités les aient regroupés, on a laissé de côté les affaires des partis politiques et tout le monde est devenu Interahamwe et ils faisaient la chasse aux Tutsi.

Président : L’église où il va y avoir des massacres, est-ce que c’est bien l’église presbytérienne de GATARE ?

Le témoin : Oui c’est là où il y avait des massacres, des gens livrés à nous par le bourgmestre.

Président :  Est-ce que ces faits ont pu avoir lieu le 17 avril 1994 ?

Le témoin : Oui, quelque part entre le 17 et le 18 avril, car c’est le 20 que nous sommes partis à bord des véhicules envoyés par le directeur de l’usine à thé de GISOVU, ainsi que ceux envoyés par le bourgmestre KAYIHURA, et son fonctionnaire assistant a été condamné aujourd’hui à perpétuité et pour lequel j’ai témoigné à charge. J’ai oublié un autre élément : c’est que tous ces bourgmestres, dont celui de KINYAMAKARA et d’autres, étaient tous dans cette réunion et ils applaudissaient le discours que venait de prononcer SEBUHURA.

Président :  Avez-vous revu SEBUHURA ?

Le témoin : Je l’ai revu une fois, quand il était venu à GIKONGORO. Quand le directeur d’une université organisait une réunion du côté du silo, nous y allions tous, c’était situé près de la prison.

Président : Combien de fois êtes-vous allez à la prison ?

Le témoin : C’était un silo de la coopérative dans lequel on a emmagasiné des grains de maïs et des haricots. Dans ces réunions en 1993/1994, j’y suis allé à  peu près trois fois.

Président : Savez-vous ce qu’il se passait à BISESERO ?

Le témoin : J’ai témoigné à ce sujet, tous ceux qui ont participé à GIKONGORO sont en prison, les autres ont fui.

Président : Environ quarante mille tutsi massacrés à BISESERO, est-ce que vous pensez que ça correspond ?

Le témoin : Celui qui dirait cela ne serait pas en train de mentir. On est allé là-bas, mais une fois sur place, les Hutu nous ont repoussés et ont même arraché au surveillant de prison un fusil.

Président : Combien de morts à l’église presbytérienne de GATARE ?

Le témoin : Treize personnes qui étaient venues de KIBUYE qui travaillaient et qui se sont réfugiés dans l’église. Ceux qui étaient originaires d’ailleurs de KIBUYE, ont été transportés par le bourgmestre en voiture, disant qu’il les transportait à KADUHA. En cours de route, on les a tués.

Président : Etes-vous allé à KADUHA ?

Le témoin : Non, je n’y suis pas allé. Là aussi les gens ont été tués dans l’église, et là les gens s’en vantaient, c’était des militaires.

Président : Avez-vous vu des militaires de la force Turquoise[5] ?

Le témoin : Lorsque je les ai vu, les militaires français avaient arrêté des voyous, ils les avaient attaqués à l’arrière du véhicule. C’est l’unique fois que je les ai vus, après je ne les ai plus revus.

Président : C’était où ?

Le témoin : A MURAMBI, c’était à BISESERO. Quand les gens ont tué la population à MURAMBI, les Français étaient là, ils n’ont rien fait.

Président : A MURAMBI, les Français étaient là pendant les massacres et ils n’ont rien fait ?

Le témoin : Ils n’ont rien fait et s’ils avaient fait quelque chose, ils auraient tué les Interahamwe.

Président : Les Français ne sont arrivés que deux mois après les massacres, alors effectivement ils ne pouvaient pas faire grand chose. Ce que vous me dites c’est ce que vous avez vu, ce qu’on vous a dit, ce qu’on vous répète?

Le témoin : Il s’agit là des choses que j’ai entendu dire.

Président : Sauf, pour apprendre le décès malheureux de votre maitresse et de votre enfant.

(Fin de l’audition aucune réponse du témoin suite à ce que dit le Président).

Maître AUBLE signale au témoin que son témoignage de 2005 devant les enquêteurs a été versé au dossier.

Le témoin précise que les armes étaient données par le bourgmestre KAYIHURA et par SEBUHAURA. Les conseillers donnaient des instructions. Mais les gens prenaient leurs propres armes: lances, machettes, gourdins.

Maître GISAGARA veut savoir, concernant les Français, si le témoin parle du 21 avril, quand sa maîtresse a été tuée, où quand les Tutsi étaient à MURAMBI en même temps que les HUTU qui fuyaient le FPR, au moment de l’Opération Turquoise.

Le témoin: Je parle de la fin du génocide, quand les Français étaient là.

Maître GISAGARA: Vous connaissez un commerçant qui s’appelait Emile KAREKEZI?

Le témoin: De nom, mais je ne me souviens pas.

Un autre avocat des parties civiles demande au témoin pourquoi il se considérait comme un leader d’opinion en 1994. Pourquoi aussi tuer GACENDELI et l’infirmier dès le 7 avril?

Le témoin: J’étais quelqu’un de convaincant. Quant aux deux personnes dont vous parlez, on disait qu’ils avaient cotisé pour le FPR.

Le ministère public demande au témoin si SEBUHURA était le chef de la gendarmerie.

Le témoin: Il y avait un commandant, SEBUHURA était son adjoint.

Le ministère public: Vous avez vu le commandant pendant le génocide?

Le témoin: On n’en parlait même pas.

Maître BIJU-DUVAL: Vous témoignez à la demande de monsieur BIZIMANA, partie civile. Vous le connaissez personnellement.

Le témoin: La personne qui vous dit cela a menti. Je ne le connais pas.

Maître BIJU-DUVAL: Vous ne savez pas que c’est monsieur BIZIMANA qui vous cite?

Le témoin: Je suis un témoin contre les responsables du génocide.

Maître BIJU-DUVAL: Vous connaissez les fonctions de BIZIMANA?

Le témoin: Je ne le connais pas.

Maître BIJU-DUVAL: Vous ne savez pas qu’il est au gouvernement?

Le témoin: J’ai 80 ans. Je ne connais pas le gouvernement. Je ne connais que le Président de la République qui passe de temp sen temps.

Maître BIJU-DUVAL: Vous connaissiez la CNLG[17] qui a entendu des quantités de personnes? Vous ne savez pas que BIZIMANA a été secrétaire général de la CNLG?

Le témoin: Comment voulez-vous que je connaisse cette CNLG. Je ne connais pas ce BIZIMANA.

Maître BIJU-DUVAL: Vous avez pris part à plusieurs attaques et que vous n’aviez tué personne. Vraiment?

Le témoin: Est-ce que je participais aux attaques pour ne pas tuer?

Maître BIJU-DUVAL: Vous avez tué ou non?

Le témoin: Je participais aux attaques, donc j’ai tué. Même si je n’ai pas tué. (????)

Maître BIJU-DUVAL: Vous avez témoigné à charge dans plusieurs procès, dont celui de HIGIRO, SEBERA, quand vous étiez en prison.  D’autres dénonciations?

Le témoin: J’ai témoigné quand j’étais en prison et quand j’étais à l’extérieur.

Maître BIJU-DUVAL: En étant témoin à charge, vous avez bénéficié d’une peine clémente?

Le témoin: Non.

Maître BIJU-DUVAL: Vous vous souvenez avoir été entendu par l’association African Rights, en avril 2005, en prison? Vous avez donné aussi des informations sur l’Opération Turquoise.

Le témoin: Je ne me souviens pas.

Maître BIJU-DUVAL: Des informations sur le bourgmestre de MUKO dans la mort de GACENDELI?

Le témoin: C’est possible.

Maître BIJU-DUVAL: Des militaires français qui auraient jeté des Tutsi du haut d’un hélicoptère?

Le témoin: Possible que j’ai dit cela. Un avion emmenait des gens et les jetait dans la forêt.

Maître BIJU-DUVAL lit deux déclarations qui lui sont attribuées concernant ce largage de Tutsi sur la forêt de NYUNGWE. Cela vous rappelle des déclarations que vous auriez faites en prison?

Le témoin: J’ai dit tout ça. Ce sont des choses qui se sont passées en 100 jours. Cela a été fait devant tout le monde, tout le monde en a parlé. Je suis chrétien.

Maître BIJU-DUVAL: Vous avez été contacté par la Commission MUCYO sur le rôle de la France?

Le témoin: Non. Nous, en tant que convertis, nous avons témoigné de nous-mêmes. J’ai témoigné contre les Français et contre les responsables. Pas devant la Commission MUCYO. Ce sont des prisonniers qui ont décidé de témoigner.

Monsieur le président met fin à l’audience. Reste à entendre un dernier témoin.

 

Audition de monseigneur Norman KAYUMBA, évêque anglican cité par la défense, en visioconférence de BUFFALO, aux USA.

« Ce que j’aurais à dire et qui fonde mon témoignage. J’étais en préfecture de GIKONGORO alors que Laurent BUCYIBARUTA était préfet. J’étais évêque du diocèse anglican de KIGEME. Il y avait d’autres confessions religieuses que je connaissais peu. En ma qualité d’évêque anglican de KIGEME, je devais savoir ce qu’il y avait comme assistance possible à l’hôpital de KIGEME. 

Les écoles étaient en vacances mais pas à KIGEME. J’ai essayé de voir comment venir en aides à tous ceux qui étaient restés, à l’école comme à l’hôpital. Le personnel soignant aussi avait besoin d’aide. Les paroisses anglicanes avaient besoin d’être réconfortées mais je devais rester à KIGEME où il y avait plus de besoins. Nous n’avions pas de militaires à notre disposition. 

Nous avions recours aux autorités administratives comme le préfet, la gendarmerie et son commandant, le bourgmestre. Voilà ce que j’ai à dire, je peux répondre à vos questions mais ne me tenez pas rigueur de mes oublis. »

La déclaration spontanée du témoin, à la relecture, présente un intérêt limité. Pour avoir voulu respecter ses propos, le style en est assez décousu. Le président va passer aux questions.

Monsieur le président interroge le témoin sur son passé à KIGEME, sa nomination et les contacts qu’il a pu avoir avec le préfet, relations essentiellement professionnelles. L’évêque est amené à évoquer son travail dans son diocèse: beaucoup de temps passé sur des éléments qui présentent peu d’intérêt pour l’affaire qui nous occupe. On apprendra que l’hôpital a toujours fonctionné pendant le génocide et que lui-même est resté en place jusqu’en 1998.

Concernant les barrières, le témoin se fie aux déclarations des chrétiens: on y demandait la carte d’identité et on tuait les Tutsi. Parfois, on pouvait être tué simplement en se fiant au physique. Mais des Hutu ont aussi été tués. L’évêque dit avoir lui-même été fouillé lors de ses passages. La présence des barrières a duré jusqu’au moment où la population a fui en exil.

Le témoin semble s’impatienter à raison: « Vous allez m’interroger sur BUCYIBARUTA? » Monsieur le président lui dit qu’il prend son temps. Il essaie d’avoir une vue générale de la situation.

Le témoin de poursuivre: « Les réfugiés qui sont venus le vendredi 8 sont restés. Nous aurions aimé que le personnel tutsi reste mais ils ont refusé. Ils voulaient rejoindre les autres.. Ceux qui ne voulaient pas rester à l’hôpital, nous les avons rassemblés dans une grande salle de l’école. Mon adjoint, évêque tutsi, a voulu les rejoindre. Ils étaient là comme dans un camp. 

J’ai commencé à m’adresser aux autorités susceptibles de nous aider. Le bourgmestre, le commandant de gendarmerie, le préfet pouvaient faire quelque chose pour moi. Je m’adressais à toute autorité qui passait par là, leur exprimant ma peine. 

Je me suis adressé au commandant de gendarmerie de BUTARE qui passait par là. J’ai vu aussi passer un ministre qui ne soutenait pas les massacres (On ne saura pas son nom). Je me demandais pourquoi il restait alors au gouvernement. Je me demande d’où venaient les ordres. J’avais la même peur que les autorités qui craignaient d’être tuées et qui craignaient qu’on tue leur population. Je dois reconnaître qu’il y avait des tueurs parmi ces autorités. Je pensais que Laurent BUCYIBARUTA pouvait m’aider. Il pouvait aussi mourir. »

Le témoin est interrogé ensuite sur la personne de SEBUHAURA.

« Ce que j’ai vu dans ce pays m’a stupéfait. SEBUHURA avait plus de poids que le commandant BIZIMUNGU, originaire de CYANGUGU. Lui était originaire de RUHENGERI ou de GISENYI. Un caporal qui se tenait devant le bureau du commandant était plus puissant que lui. »

Après plus de deux heures d’audition, on en arrive enfin aux questions concernant BUCYIBARUTA.

« C’est le premier avec qui je me suis entretenu. Dès le 7 avril, nous avions interdiction de quitter notre domicile. J’étais à GIKONGORO mais mes responsabilités étaient à KIGEME. Pour pouvoir circuler, j’ai contacté le préfet qui m’a rédigé  une attestation que je gardais toujours avec moi. C’était le vendredi 8 avril.

Laurent BUCYIBARUTA avait un bon coeur. Il voulait regrouper ceux qui voulaient remettre les choses dans le droit chemin (sic). Il a mis en place un conseil de sécurité. Il invitait les sous-préfets mais aussi les représentants des confessions  religieuses. Il convoquait aussi les bourgmestres des communes proches. La première réunion concernait la question des déplacés intérieurs regroupés à l’ETO de MURAMBI. Seule la CARITAS pouvait fournir de l’aide. La population hutu proche du camp avait peur de cohabiter avec les Tutsi. Personnellement, je voulais surtout une protection militaire. Je voulais que cette force s’oppose aux tueurs. Le préfet et le commandant ne pouvait protéger des gens réfugiés partout. Il n’y avait pas plus de 50 gendarmes à GIKONGORO. Décision a été prise de regrouper les réfugiés à MURAMBI. Je suppose que Laurent BUCYIBARUTA a dû prendre lui aussi cette décision. Je pense à 100 % que ce transfert avait pour but de protéger les réfugiés. Il n’y avait pas d’autre choix pour les Tutsi. Ils ont été forcés de s’y rendre, les tueurs étaient à leurs trousses. J’ai été surpris que les réfugiés, placés sous la garde des gendarmes, aient pu être attaqués. Par contre, je n’ai appris qu’après les conditions dans lesquelles vivaient ces réfugiés! » (NDR. Cette remarque est-elle vraiment crédible? Le témoin, tout en cherchant à couvrir l’accusé, veut se couvrir aussi.)

Le témoin, qui reverra le préfet après les grands massacres, reconnaît n’avoir jamais reparlé de ces tueries de masse: « C’était du passé. »

Evocation ensuite des événements qui se sont produits le jour de la Pentecôte à KIGEME.

Les réunions qui se sont tenues après avaient-elles pour objectif de mettre fin à la traque des Tutsi ou bien était-ce un leurre? demande le président.

« Je ne sais pas comment répondre. Le chaos régnait au Rwanda. Des pressions étaient exercées par les personnes qui dirigeaient le génocide et qui étaient plus puissantes que les autorités. Lors de la réunion avec Jean KAMBANDA, j’ai dit des choses mal rapportées par les journalistes. « On ne peut pas être une autorité si on ne peut pas protéger les gens. Vous vous battez pour conserver le pays. Mais vous ne pourrez pas si vous continuez ainsi. Vous n’aurez aucun Tutsi à montrer à GIKONGORO. » Tout le monde n’a pas apprécié mes propos. On m’a dit que j’allais avoir la visite des tueurs. Mais ils ne sont jamais venus. Jai compris que peu d’autorités pouvaient nous aider » (NDR. Des propos courageux, à condition qu’ils aient été vraiment tenus. Avec ce témoin, on peut avoir des doutes.)

Question du président: « Une autorité peut faire semblant d’avoir encore du pouvoir? »

« Que Laurent BUCYIBARUTA me pardonne. Je vais dire une chose que je n’ai encore jamais dite. Lors de l’attaque de KIGEME le jour de Pentecôte. Ce jour-là, j’ai vu, vers 10 heurs, arriver les attaques. Il me semble que j’ai envoyé mon chauffeur rencontrer BIZIMUNGU car les assaillants avaient des armes. J’ai vu le préfet venir faire soigner son enfant, mais pas pour nous aider. (…) Quand les chefs des attaques sont venus, ils ont cru qu’on allait leur donner le droit de tuer. Nous leur avons dit qu’il ne fallait pas se tromper d’ennemi, comme KAMBANDA l’avait demandé.

Ils se sont alors adressé au préfet en l’agressant: « Tais-toi! Pars de là. Où est ta femme, ton chauffeur? Il est où cet Inyenzi? » Ils voulaient le tuer. Ils faisaient probablement allusion aux Tutsi qu’il cachait chez lui. « J’ai vu qu’il n’avait plus aucun pouvoir, c’était clair. BIZIMUNGU s’est adressé à eux sur un ton ferme: « Si vous voulez vous affronter à mes gendarmes, restez. Sinon, partez. »

« Ils sont partis pour revenir le soir. Dieu seul peut savoir si vous êtes un tueur ou non. Personnellement, je pense que Laurent BUCYIBARUTA a fait ce qu’il a pu. Il était toujours là quand j’ai eu besoin de lui. Il n’a jamais rusé avec moi.  les tueurs n’avaient pas confiance en lui car il avait une femme tutsi. Comme préfet, il devait être prudent. Je ne pouvais pas être avec lui 24h/24. Les pensées qu’il avait ne pouvaient pas soutenir les tueries (sic) »

Les questions qui vont être posées ensuite portent dur des précisions que le témoin tente de donner. L’évêque répond assez souvent à côté, volontairement ou pas, mais son témoignage, demandé par la défense, ne sera peut-être pas d’un grand secours pour l’accusé. Ses propos, comme vous le verrez à la lecture, manquent de cohérence. Peut-être aurait-il mieux valu passer cette audience sous silence.

Sur question du ministère public, le témoin déclare ne pas nier qu’il est toujours en contact avec l’accusé.

A noter qu’au moment où la parole est donnée aux parties civiles, monsieur le président reprend une nouvelle fois maître GISAGARA pour la longueur de ses questions. Ce dernier tente à raison de se justifier, trop peu de temps étant laissé, depuis le début du procès, aux questions des parties. Il décide alors de quitter la salle d’audience. Par solidarité, les autres avocats décident à leur tour de quitter la salle avant la fin de l’audience. 

Mathilde LAMBERT

Alain GAUTHIER

Jacques BIGOT

 

  1. MRND : Mouvement Républicain National pour la Démocratie et le Développement, ex-Mouvement révolutionnaire national pour le développement, parti unique de 1975 à 1991 fondé par Juvénal HABYARIMANA.[]
  2. Aloys SIMBA : officier à la retraite au moment du génocide, chef de la défense civile dans les préfectures de Butare et Gikongoro, condamné par le TPIR à 25 ans de prison pour « génocide et extermination, crimes contre l’humanité »[][]
  3. Inkotanyi : combattant du FPR (terme utilisé à partir de 1990). Cf. glossaire.[]
  4. Interahamwe : « Ceux qui combattent ensemble » ou « qui s’entendent », mouvement de jeunesse et milice recevant une formation militaire, créé en 1992 par le MRND, le parti du président HABYARIMANA. Voir FOCUS – Les Interahamwe.[]
  5. Opération Turquoise organisée par la France en juin 1994.[][]
  6. CRF : Communauté Rwandaise de France[]
  7. CDR : Coalition pour la défense de la République, parti Hutu extrémiste, créé en mars 1992, au moment des massacres de Tutsi dans le Bugesera. La CDR a également une milice, les Impuzamugambi., cf. glossaire[]
  8. MDR : Mouvement Démocratique Républicain, voir glossaire[]
  9. Gacaca : (se prononce « gatchatcha »)
    Tribunaux traditionnels au Rwanda, réactivés en 2001 et opérationnelles à partir de 2005, en raison de la saturation des institutions judiciaires pour juger des personnes suspectées de meurtre pendant le génocide. Composées de personnes élues pour leur bonne réputation, les Gacaca avaient une vocation judiciaire et réconciliatrice, favorisant le plaider coupable en contrepartie de réduction de peines. Près de 2 millions de dossiers ont été examinés par 12000 tribunaux gacaca avant leur clôture officielle le 18 juin 2012.
    Cf. glossaire.[]
  10. PSD : Parti Social Démocrate, créé en juillet 1991. C’est un parti d’opposition surtout implanté dans le Sud, voir glossaire[]
  11. Lors de son audition, Jean-Damascène BIZIMANA déclarera cependant n’avoir jamais  demandé à cette personne d’intervenir![]
  12. CIPEP : Centre Intercommunal de Développement du Personnel[]
  13. Capitaine Faustin SEBUHURA : commandant adjoint de la gendarmerie de Gikongoro.[]
  14. FPR : Front Patriotique Rwandais[]
  15. Ibid.[]
  16. Ibid. []
  17. CNLG : Commission Nationale de Lutte contre le Génocide[]

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