Le génocide est notre affaire, où qu’il se produise.
On a considéré en 1945 que le génocide des Juifs n’était pas l’affaire des Allemands : au « charbonnier est maître chez soi » que proclamait Goebbels pour revendiquer l’autorité de l’Allemagne à faire ce qu’elle veut sur son territoire, a été substituée la notion que la protection des valeurs fondamentales d’humanité était une responsabilité de l’humanité toute entière, de la communauté internationale elle-même.
Cela s’est traduit par la création du premier tribunal international, celui de Nüremberg, pour que les auteurs de crimes contre l’humanité rendent des comptes à une justice internationale.
Dans le même mouvement a été créée l’ONU, qui en 1948 a adopté la Déclaration universelle des droits de l’homme et la convention internationale contre le génocide.
Le génocide et les crimes contre l’humanité, qui sont situés à la cime de l’échelle de gravité des crimes, ont été rendus imprescriptibles.
Leurs auteurs peuvent ainsi être poursuivis sans limitation dans le temps ; ils peuvent aussi être poursuivis sans limitation dans l’espace.
Où qu’ils se trouvent, quand ils sont identifiés, ils doivent pouvoir être jugés.
C’est la communauté internationale elle-même, avec la création de tribunaux internationaux et le principe de compétence universelle, qui prend en charge et organise la répression de cette violence de masse, qui dépasse toute échelle, qui heurte les consciences non seulement dans le pays où elle s’est déroulée, mais dans le monde entier.
Les évènements de 1994 n’ont été possibles que parce que la communauté internationale, dans les premiers temps, s’en est désintéressée et a considéré que ce n’était qu’une affaire entre Rwandais.
Mais une fois la conscience acquise de l’ampleur de ce qui s’était passé, il devenait impossible de laisser le Rwanda gérer seul les conséquences de ces cent jours de massacres.
Le Conseil de sécurité de l’ONU a créé un tribunal international, le TPIR, qui a siégé à Arusha, en Tanzanie, pour juger les plus importants responsables, les ministres, les préfets… et qui à fermé ses portes après 20 ans de fonctionnement.
« Le TPIR est fermé mais des génocidaires vivent toujours en liberté » – Lire l’interview d’Alain Gauthier – Le Monde, 17/12/15
Dans le même temps, parce que le TPIR ne pouvait juger tous les responsables, l’ONU a demandé à tous les Etats de retrouver et juger devant leurs propres tribunaux les génocidaires qui seraient retrouvés sur leurs territoires.
La France est loin d’avoir été la première à juger un accusé pour le génocide des Tutsi. Avant elle la Belgique, le Canada, les Pays-Bas, la Suisse, la Norvège, la Finlande, notamment, l’ont déjà fait et des enquêtes sont en cours en vue de futurs procès en Angleterre, en Italie, au Danemark…
Refus d’extrader : l’avis de Damien Roets, professeur de droit.
A plus de vingt reprises, la Cour de cassation a refusé d’extrader vers le Rwanda des personnes soupçonnées d’avoir participé au génocide sous le prétexte fallacieux que la loi organique punissant le génocide au Rwanda est postérieure au génocide lui-même.
Lire l’article de Damien Roets
C’est parce qu’un génocide est un crime contre l’humanité toute entière qu’aucun pays n’a le droit de s’en désintéresser.
D’après un article initialement publié sur « Procès Génocide Rwanda », un site conçu et réalisé par Stéphanie Monsénégo (SCM Conseil) et Sophie Chaudoit pour le procès de Pascal Simbikangwa en 2014.