Par une dépêche de l’AFP, nous apprenons que « le parquet de Paris a requis le renvoi aux assises de Pascal Simbikangwa ». En demandant la clôture de l’instruction en février dernier, les juges souhaitaient mettre fin aux investigations qu’ils avaient entreprises lors de commissions rogatoires, essentiellement conduites au Rwanda et auprès du TPIR. Les parties civiles avaient été averties de cette décision voici quelques semaines. Reste maintenant à attendre la décision des juges d’instruction du « pôle crimes contre l’humanité » de la Rue des Italiens à Paris mais il serait étonnant qu’ils ne suivent pas les réquisitions du parquet.
Arrêté à Mayotte en octobre 2008 où le CPCR l’avait localisé, le capitaine Pascal Simbikangwa a commencé par puger une peine de prison pour trafic de faux papiers. Suite à une plainte du CPCR en février 2009, ce proche de la famille Habyarimana, et surtout du noyau dur qui s’était constitué autour de la femme du président défunt, Agathe Kanziga, Pascal Simbikangwa a été mis en examen et incarcéré à la prison de Fresnes. Malgré plusieurs demandes de remise en liberté, les magistrats ont toujours refusé de libérer cet homme connu au Rwanda pour sa cruauté et son implication dans le génocide des Tutsi, comme le révèlent de nombreux témoignages. Handicapé physique depuis un accident de voiture, c’est en fauteuil roulant que le capitaine Simbikangwa a perpétré le génocide, c’est en fauteuil roulant qu’il devrait comparaître devant ses juges d’ici quelques mois.
Cette nouvelle, même si elle était attendue, n’en réjouit pas moins le CPCR qui a travaillé sur ce dossier pendant de nombreux mois. Plusieurs séjours au Rwanda nous ont permis d’enrichir le dossier de témoignages très souvent concordants: Simbikangwa a été un agent actif du génocide qui, malgré son handicap, a livré des armes aux Interahamwe, les a encouragés à éliminer les Tutsi, s’est présenté plusieurs fois aux barrières proches de son domicile à Kiyovu, au coeur de la capitale rwandaise, pour s’assurer que les militaires et les miliciens s’acquittaient bien du « travail » demandé. Il s’est aussi illustré dans l’ancienne préfecture de Gisenyi, à l’ouest du pays, où il a été aperçu en compagnie d’autres grands responsables du régime génocidaire.
Comme nous aimons à le rappeler, le combat ne fait que commencer. Mais si ce procès en assises a lieu, le premier en France, il pourrait en annoncer beaucoup d’autres dans la mesure où une vingtaine de plaintes ont été déposées. Les juges d’instruction du « pôle crimes contre l’humanité » ont récemment redit leur détermination à mener de front plusieurs dossiers, conscients que la justice de notre pays n’a que trop tardé. Il est hors de question de mettre leur parole en doute. Mais nous attendons des actes: les victimes que nous rencontrons depuis près de douze ans ne comprendaient pas plus que nous tout nouveau retard apporté à juger les auteurs du crime le plus odieux, le crime de génocide, crime contre l’humanité s’il en est. Ces procès marqueraient aussi un coup d’arrêt à l’impunité qui fait le lit du négationnisme. Ces procès donneraient enfin une légitimité au combat que nous menons au nom de toutes les victimes.