Comme on pouvait le prévoir, les magistrats de la Cour d’appel de Douai, comme la plupart de leurs collègues en France, on refusé de prononcer l’extradition du colonel Laurent Serubuga réclamé par le Rwanda. Les arguments avancés sont toujours les mêmes et dénotent, chez les magistrats, une méconnaissance totale du Rwanda et de sa justice . Cette décision est un non-événement et on peut se poser la question de savoir si le Rwanda doit continuer à adresser des mandats d’arrêts internationaux aux autorités françaises. Le seul intérêt que nous pouvons y voir c’est que ces demandes d’extradition permettent de parler du génocide des Tutsi en attendant le premier procès d’assises en février prochain à l’encontre de Pascal Simbikangwa, incarcéré à la prison de Fresnes. L’avocat et la famille de Laurent Serubuga prétendent qu’il « n’y a pas de preuves » de la responsabilité de Laurent Serubuga dans le génocide des Tutsi: c’est une façon pour eux de tromper l’opinion française puisque les magistrats chargés de l’extradition n’ont pas à se prononcer sur le fond. En refusant d’extrader, les magistrats ne disent pas que les accusations sont infondées: ils déclarent simplement que le prévenu ne bénéficiera pas au Rwanda d’un procès équitable. Pire: ils vont jusqu’à évoquer qu’il ne peut y avoir de rétroactivité dans la mesure où la loi organique punissant le génocide au Rwanda est postérieure au génocide lui-même ! Vu l’âge et l’état de santé du colonel Serubuga, vu le nombre des plaintes déposées au « pôle crimes contre l’humanité » au TGI de Paris, ont peut penser que ce monsieur n’aura jamais de comptes à rendre à la justice. C’est bien le seul regret qu’on peut exprimer à ce jour. Pourquoi avoir attendu vingt ans pour commencer des procès d’assises ? Tout le monde le sait, le temps joue en faveur des bourreaux. Bien sûr, il reste la conscience individuelle de chacune des personnes poursuivies, mais il semble assez clair que le seul moyen pour elles de continuer à vivre est de nier systématiquement toute responsabilité dans le génocide des Tutsi perpétré au Rwanda. Comment continuer à vivre avec un tel poids sur la conscience ? Seule la justice, comme nous aimons à le répéter, pourrait leur donner l’occasion de réintégrer la communauté des hommes qu’ils ont quittée. Nous continuerons à nous battre pour que les présumés génocidaires rwandais présents sur le sol français soient jugés. Beaucoup échapperont à cette justice des hommes. Mais comme nombre d’entre eux semblent avoir des convictions religieuses, ils devraient redouter la justice de Dieu !
Laurent Serubuga, comme probalement Claude Muhayimana et Innocent Musabyiamana le 25 septembre, comme près d’une quinzaine d’autres présumés génocidaires rwandais réclamés par leur pays, ne sera pas extradé. La France se singularise donc dans l’accueil de personnes soupçonnées d’avoir participé au pire des crimes, le crime de génocide. Contrairement à toutes les déclarations lénifiantes de nombreux responsables politiques français, la France est bien devenue une terre d’accueil pour présumés génocidaires rwandais. Cette situation ne semble pas préoccuper grand monde mais en dit long sur la santé morale de ceux qui se bousculent à chaque élection pour briguer les suffrages de nos concitoyens. Entrer en politique, n’est-ce pas se mettre au service de son pays, au service de la communauté des hommes ? Ils sont rares, nos responsables politiques, qui ont osé dénoncer la présence de présumés génocidaires sur le sol français. Contre vents et marées, nous continuerons à dénoncer cette situation qui est une honte, nous continuerons à demander à ce que justice soit rendue aux victimes du génocide des Tutsi et à leurs familles. Ne faudrait-il pas un sursaut de nos concitoyens pour, à nos côtés, exiger cette justice ?