La Chambre de l’Instruction de la Cour d’appel de Dijon a émis un avis favorable à l’extradition d’Innocent Musabyimana vers le Rwanda. Arrêté tout récemment à Longvic, près de Dijon (France), monsieur Musabyimana était visé par un mandat d’arrêt international émis par le Rwanda en novembre dernier.
Le Procureur de Dijon avait déclaré que monsieur Musabyimana était poursuivi pour « un certain nombre d’infractions« . Cette qualification des faits a pu surprendre plus d’un car il s’agit en réalité de « génocide, crimes contre l’humanité, meurtres, viols… » Il faut dire que le génocide des Tutsi perpétré au Rwanda en 1994 n’est pas l’événement le plus connu en France, même par nos magistrats chargés de se prononcer dans des affaires d’extradition. Il suffit de se reporter à toutes les décisions de la Chambre de l’Instruction de la Cour d’appel de Paris pour s’en convaincre. Seules des Cours d’appel de province ont à ce jour émis des décisions favorables à l’extradition d’un présumé génocidaire rwandais, décisions chaque fois remises en cause par la Cour de cassation: Kamana à Chambéry, Baligira à Rennes, Muhayimana à Rouen.
Le 1er février, nous saurons si Innocent Musabyimana est remis en liberté, comme il en a fait la demande. Si c’était le cas, il ne faudrait pas s’en étonner: ce ne serait pas la première fois non plus qu’une telle décision est prise en faveur d’un présumé génocidaire rwandais.
Inutile donc de se réjouir trop vite de cette annonce. La jurisprudence joue bien évidemment en sa faveur. Il faut alors comprendre la colère des victimes et de leurs familles qui ne supportent plus qu’aucun procès de génocidaire n’ait encore été organisé en France. Nous ne cessons de le répéter: le temps joue en faveur des bourreaux. Il est urgent que des présumés génocidaires soient déférés devant une Cour d’assise et que la justice française se prononce enfin. Plusieurs affaires seront probablement une priorité pour les juges d’instruction: Simbikangwa et Ngenzi, tous deux incarcérés et qui ne pourront rester indéfiniment en prison sans être jugés; Munyeshyaka et Bucyibaruta, deux dossiers transmis par le TPIR et dont la justice française a promis de s’occuper, sans parler du cas des médecins Munyemana, Twagira et Rwamucyo, ainsi que celui de madame Kanziga… et tous les autres. Du travail en perspective pour les juges et pour nos avocats. Notre patience est mise à l’épreuve mais nous nous battrons sans relâche. La mémoire de nos défunts, la douleur des familles et notre soif de justice sont les moteurs de nos actions.