Messieurs Thuiller et Royan,
En date du 5 février 2015, je m’étais permis de vous adresser, au nom des membres de notre association et des victimes que nous représentons, une lettre de protestation à propos d’un « dérapage » de monsieur THEVENOT, journaliste, et de son invité du jour, vous-même, monsieur ROYANT, lors du Télé Matin du 31 janvier. Le génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda en 1994 était présenté comme le « le génocide rwandais, où la communauté hutu va être entièrement massacrée par les Tutsi. ». Cette contre-vérité historique avait soulevé un vif émoi, tant chez les victimes que chez tous ceux qui les soutiennent et qui connaissent la vérité historique. Le mardi 3 février, monsieur THEVENOT, à la fin de sa chronique, avait rapidement reconnu qu’il s’agissait bien « du génocide des Tutsi par les Hutu », en clôturant son intervention par un rapide « Voilà » que l’on pouvait interpréter de bien des façons.
Votre silence au courrier que je vous ai personnellement adressé a choqué tous ceux que cet « incident » avait plongés dans l’effroi. Nous aurions pu penser que vous exprimeriez par écrit vos regrets sincères pour une telle « bévue ». Nous aurions accepté vos excuses et mis cette « erreur », toute incroyable qu’elle soit, sur le compte de la précipitation ou de la pression à laquelle sont soumis les médias. Nous aurions aimé ressentir un peu de compassion, voire d’empathie de votre part avec les victimes du génocide des Tutsi. Rien de tout cela : un silence méprisant, indigne d’hommes qui sont sensés faire l’opinion. « L’erreur est humaine », dit le proverbe, mais, finalement, était-ce bien une erreur ? Nous pouvons légitimement nous poser la question vu votre manque de réaction.
Je me permets donc de vous adresser une « lettre ouverte » que nous avons récemment publiée. Je suppose que ce courrier que je vous envoie ce jour n’aura pas plus d’écho que le premier. Mais vous aurez au moins compris, peut-être, la lourde responsabilité qui est la vôtre lorsque vous diffusez des contre-vérités qui participent au négationnisme ambiant. Un vague rectificatif, en face d’une affirmation aussi choquante, ne peut suffire.
Messieurs THUILLIER et ROYANT, monsieur THEVENOT, à qui notre premier courrier a dû être transmis, croyez bien que notre seul objectif consiste à refuser que les « mensonges » proférés dans les médias ne jettent le trouble chez tous ceux qui les entendent. Nous devons déjà nous battre pour que justice soit rendue aux victimes, et il ne se passe pas une semaine sans que nous ayons aussi à dénoncer, en particulier sur les réseaux sociaux, les affirmations pour le moins tendancieuses quand ce ne sont pas des mensonges délibérés. Trop, c’est trop.
Je vous prie de croire, messieurs, en l’expression, non seulement de notre déception, mais aussi parfois de notre colère, et, malgré tout, du respect que nous devons à tous ceux qui veulent que la vérité soit dite. Ce respect, nous hésitons à vous l’accorder tant vous en avez manqué à l’égard des victimes du génocide des Tutsi.
Alain GAUTHIER, président du CPCR