La Cour d’appel de Paris, par un arrêt du 25 août 2022, vient de rejeter, pour la deuxième fois, la demande de remise en liberté de Claude MUHAYIMANA. Condamné le 16 décembre 2021 à 14 ans de réclusion criminelle pour « complicité de génocide et complicité de crimes contre l’humanité »[1], monsieur MUHAYIMANA a fait appel de sa condamnation et demandé aussitôt sa remise en liberté. Une première demande avait été rejetée le 23 mars 2022.
La Cour d’appel précise que « Claude MUHAYIMANA se trouve détenu nonobstant son appel en application de l’article 367 du code de procédure pénale, l’arrêt de la cour d’assises valant titre de détention. En dépit des arguments développés dans la demande de mise en liberté de ses conseils, la détention provisoire de l’intéressé est toujours l’unique moyen de garantir son maintien à la disposition de la justice […] et de mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public provoqué par la gravité de l’infraction, les circonstances de sa commission et l’importance du préjudice causé, s’agissant de massacres systématiques perpétrés à grande échelle sur une partie de la population rwandaise en raison de son ethnie, lesquels ont imprégné la mémoire collective de sorte qu’une mise en liberté pourrait réactiver les souffrances endurées […} Enfin, la cour relève que Claude MUHAYIMANA a été jugé en première instance le 16 décembre 2021. La détention provisoire n’apparaît pas ce jour contraire aux exigences du délai raisonnable au sens de l’article 6 & 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, au vu notamment des investigations entreprises, en particulier à l’étranger, du nombre de témoins entendus, des nombreux interrogatoires menés et de la complexité de l’affaire. En conséquence, il convient de rejeter la demande présentée. »
Concernant Laurent BUCYIBARUTA, condamné à 20 de réclusion criminelle pour « complicité de génocide et complicité de crimes contre l’humanité »[2], il se trouve actuellement dans un hôpital parisien, aucun lieu de détention ne pouvant assurer les soins médicaux dont il relève. Ses conseils ont déposé une demande de mise en liberté et une décision devait être rendue le 12 septembre. Il est à craindre que, vu sa situation, l’ancien préfet de GIKONGORO soit remis en liberté sous contrôle judiciaire en attendant sa nouvelle comparution devant la cour d’assises de Paris.
Enfin, en marge du procès de Laurent BUCYIBARUTA, nous avions appris que monsieur Vénuste NYOMBAYIRE, responsable de SOS Village enfants de GIKONGORO en 1994, avait bénéficié d’un non-lieu définitif. Cette décision, prononcée le 9 juin 2022, n’avait été rendue publique que le 21 juillet. Le CPCR avait déposé plainte contre lui en 2011.
Pour mémoire, le procès de monsieur Philippe HATEGEKIMANA, MANIER depuis sa naturalisation française, se tiendra devant la cour d’assises de Paris du 9 mai au 1er juillet 2023. Contrairement aux annonces qui ont pu être faites, il n’y aura toujours pas deux procès par an contre des Rwandais soupçonnés d’avoir participé au génocide des Tutsi. Si l’on doit prévoir les procès en appel, ceux de Claude MUHAYIMANA et de Laurent BUCYIBARUTA, il faudra beaucoup de temps pour juger tous ceux qui sont visés par des plaintes. Le procès du docteur Sosthène MUNYEMANA n’est toujours pas sur le calendrier de la cour d’assises de Paris. Quant au docteur Eugène RWAMUCYO, lui aussi déféré devant les assises, nous attendons la décision concernant l’appel qu’il a interjeté. Peut-on parler encore de délais raisonnables?
Alain GAUTHIER, président du CPCR
- Voir Procès Claude MUHAYIMANA[↑]
- Voir Procès Laurent BUCYIBARUTA[↑]