Affaire Munyeshyaka: non-lieu requis par le Procureur: stupeur

Nous venons d’apprendre par plusieurs dépêches que le Procureur, dans son réquisitoire que nous attendions avec impatience, a requis un non-lieu dans l’affaire Munyeshyaka, prêtre de la paroisse de Gisors dans le diocèse d’Evreux, en France. Cette affaire ne cessait de défrayer la chronique et était devenue très emblématique des errements de la justice française. Poursuivi en France pour génocide dès 1995, l’abbé Munyeshyaka avait aussi un dossier au TPIR. Le Tribunal International d’Arusha avait décidé, voici plusieurs années, de confier ce dossier à la justice française, tout comme celui du préfet de Gikongoro, Laurent Bucyibaruta. Va-t-elle le regretter?

« S’il ressort des investigations que le rôle de Wenceslas Munyeshyaka durant le génocide de 1994 a pu susciter de très nombreuses interrogations (…), l’instruction n’a pas permis, au final, de corroborer de façon formelle des actes précis et certains d’une participation active » indique le Pocureur François Molins dans son communiqué.

Notre premier sentiment, est la stupéfaction. De nombreux témoins rescapés de l’église de la Sainte Famille à Kigali ont accusé l’abbé Munyeshyaka d’avoir été un acteur actif dans le génocide des Tutsi. Un tribunal militaire au Rwanda avait condamné le prêtre à la prison à perpétuité. Vingt ans d’enquêtes pour en arriver là: c’est incompréhensible. Ce 19 août 2015 sera marqué par une immense tristesse pour les rescapés de cette paroisse. Probablement aussi par une grande colère.

Reste à attendre la position des juges d’instruction qui, nous l’espérons, refuseront de suivre le Procureur. Mais la décision du magistrat français ne manquera pas de susciter, au Rwanda, une nouvelle méfiance bien compréhensible à l’égard de la justice française.

Le combat que nous menons au sein du CPCR est un combat pour la justice. En prenant connaissance de la décision du Procureur, nous pourrions être découragés, voire désespérés que la voix des victimes ne soit pas entendue. Nous continuerons à nous battre pour les rescapés et leurs familles. En évitant le découragement qui nous guette.

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