Le 6 juillet 2018, la Cour d’assises de Paris condamnait en appel à la réclusion criminelle à perpétuité Tito BARAHIRA et Octavien NGENZI, deux anciens maires de la commune de Kabarondo, à l’Est du Rwanda. Covid 19 aidant, il aura fallu attendre plus de deux ans et demi pour que nous puissions avoir droit à un nouveau procès : Claude MUHAYIMANA, un employé municipal de la ville de Rouen, devait être jugé en octobre. Son procès se déroulera finalement du 2 au 26 février 2021. Cet Interahamwe est poursuivi pour complicité de génocide et complicité de crimes contre l’humanité pour sa participation à l’extermination des Tutsi dans sa région d’origine de Kibuye, aujourd’hui Karongi.
Si cette annonce ne peut que réjouir tous ceux qui se battent pour que justice soit rendue aux victimes du génocide et à leurs familles, ce nouveau procès ne sera que le troisième en 26 ans. Pas de quoi pavoiser. Nous ne cesserons jamais de dénoncer les lenteurs de la justice française, tout en reconnaissant l’énorme travail des juges d’instruction et des gendarmes enquêteurs.
Dans un courrier adressé au nouveau ministre de la Justice le 15 juillet 2020, le CPCR demandait que soient alloués plus de moyens à la poursuite des personnes soupçonnées d’avoir participé au génocide des Tutsi. Une réponse du 9 décembre rappelait « l’entier engagement du ministère de la justice dans le suivi des procédures relatives au génocide rwandais » (Toujours pas de « génocide des Tutsi » !) Nous était annoncée aussi « la création d’une nouvelle division spécifiquement chargée de « la lutte contre les crimes de haine » au sein de l’office central de lutte contre les crimes contre l’humanité ». Cette nouvelle organisation devant s’accompagner d’un renforcement des effectifs de l’office avec l’arrivée de nouveaux personnels.
Cette réponse, comme toutes celles reçues depuis 26 ans de la part des différents ministres de la justice, ne peut nous satisfaire. Nous n’arrivons jamais à obtenir de réponses franches aux questions que nous posons.
Nous attendrons aussi avec beaucoup d’impatience les procès à venir : ceux du préfet Laurent BUCYIBARUTA, des médecins Sosthène MUNYEMANA et Eugène RWAMUCYO qui ont fait appel de leur renvoi devant la Cour d’assises. Plusieurs affaires ont vu leur instruction clôturée : la dernière en date, celle de Hyacinthe Rafiki NSENGIYUMVA, ancien ministre du gouvernement intérimaire et responsable des FDLR après le génocide des Tutsi.
L’année 2021 commencera donc par un nouveau procès d’assises. Mais nous ne cesserons de répéter qu’au rythme d’un procès tous les deux ou trois ans, beaucoup de ceux qui sont dans le collimateur de la justice française risquent de ne jamais être jugés. Cette pensée nous est intolérable.
Bonne année à chacun de vous, bonne année de justice au service de la paix et de la véritable réconciliation.
Alain GAUTHIER, président du CPCR